Treize kilomètres de livres réunis sous un même toit

C’est un projet phare de la législature en cours en Ville de Neuchâtel. Le Conseil général est appelé à se pencher lundi prochain sur une demande d’assainissement du Collège latin et de réaménagement de la place Agota Kristof. Le lieu est voué à réunir plusieurs bibliothèques de la Ville pour en faire un véritable pôle culturel. Cette ambition a un coût : l’ensemble des crédits sollicités frôle les 40 millions de francs (39,96 millions de francs). Des subventions du Canton et de la Confédération devraient toutefois alléger un peu la facture.

L’objectif est d’installer sous un même toit la Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel (BPUN), la bibliothèque Pestalozzi, Bibliomonde, mais également la Lanterne magique, avec la création d’un espace d’éducation à l’image. Cela représentera 13 kilomètres linéaires de collections réunis en un seul lieu. Un café-restaurant verrait aussi le jour, de même qu’une artothèque, un lieu où le public pourrait emprunter des œuvres d’art.

Vers une bibliothèque unique pour Neuchâtel

Toutes ces entités seront réunies sous la bannière : Bibliothèque de Neuchâtel. Une fondation du même nom a d’ores et déjà vu le jour au 1^er janvier de cette année et intègre ces différents acteurs avec leur personnel respectif, ainsi que les bibliothèques de Peseux et de Corcelles-Cormondrèche, qui maintiendront quant à elles leur site actuel.

La Bibliothèque de Neuchâtel est pensée comme un lieu de vie, où « passer du temps, travailler, s’informer, se distraire, se reposer, échanger avec d’autres », peut-on lire dans le rapport.

Le rez-de-chaussée abritera l’Espace Rousseau de la BPUN, qui abrite des manuscrits et 2'800 lettres originales de Jean-Jacques Rousseau. On y trouvera également le café-restaurant et une nouvelle salle de conférence polyvalente de 70 places. Le 1^er étage sera dédié aux bureaux et aux espaces administratifs. La salle de lecture sera maintenue. Un espace jeunesse est voué à prendre place dans les combles. L’accès sera facilité pour les personnes à mobilité réduite avec deux rampes d’accès qui seront construites au sud du bâtiment et deux ascenseurs à l’intérieur. 

Le début des travaux est prévu dès la fin de l’année et la mise en service des lieux est imaginée pour début 2028. Durant ce laps de temps, la BPUN devra réaliser un double déménagement. Elle s’installera dans des structures provisoires, avant de pouvoir regagner le Collège latin rénové.

Réduire la consommation énergétique du Collège latin

Ces travaux d’assainissement doivent permettre de rendre le Collège latin moins énergivore. Actuellement, le bâtiment est mal classé en la matière. Le site sera raccordé au chauffage à distance. L’isolation sera améliorée notamment au niveau de la toiture et des fenêtres. Des panneaux photovoltaïques prendront place sur le toit et permettront de produire davantage d’énergie que n’en consomme le bâtiment. Le surplus sera réinjecté dans le réseau.

Des mesures seront prises pour éviter les infiltrations d’eau et le système de détection des incendies sera complètement revu. L’ensemble de ces travaux doit permettre de faire « des économies à hauteur de 40% pour l’énergie thermique et entre 30 et 50% pour l’énergie électrique », indique le rapport.

La place Agota Kristof, au sud du Collège latin, sera également réaménagée. Une terrasse rattachée au café-restaurant y sera installée. Les sols seront plus perméables qu’aujourd’hui, notamment pour réduire l’effet d’ilot de chaleur.

Principaux intéressés enthousiastes

Le concept semble séduire les acteurs concernés. La présidente de l’association de la bibliothèque Pestalozzi, Sylvie Hofer-Carbonnier, parle d’un « projet enthousiasmant, magnifique ». « Cela fait 15 à 20 ans qu’on cherche des locaux plus grands. On se réjouit beaucoup d’avoir un espace digne de ce nom pour accueillir les enfants de la ville et d’au-delà », ajoute-t-elle. Le nouvel espace jeunesse, prévu dans les combles, permettra de distinguer davantage les flux de lecteurs en fonction de leur âge, avec un coin pour les petits et un autre davantage tourné vers les adolescents.

Martine Steiger Burgos, membre du comité de Bibliomonde, parle elle aussi d’un « projet magnifique ». Elle salue le fait de réunir les publics des différentes bibliothèques. Ce pôle culturel permettra aussi à Bibliomonde de professionnaliser ses services d’acquisitions et de prêts des ouvrages, ainsi que d’intégrer le catalogue en ligne de la BPUN. « Le seul point négatif, c’est qu’on risque de perdre des bénévoles », parmi ceux qui assuraient une permanence lors des heures d’ouverture de la bibliothèque, ajoute-t-elle. Martine Steiger Burgos évoque aussi l’accueil des personnes migrantes « qui devra être bien pensé », dans la nouvelle entité, afin que celles-ci n’aient pas peur d’entrer dans le bâtiment. Pour le reste, le déménagement au Collège latin apportera à Bibliomonde davantage d’espace pour accueillir des groupes, par exemple.

Du côté de la Lanterne magique, l’espace prévu au Collège latin constituera un outil de travail supplémentaire. Ilan Vallotton, le directeur exécutif du club de cinéma dédié à la jeunesse, y voit le moyen de mettre sur pied des ateliers avec des classes et des cinéastes, dans le but d’initier les élèves à la réalisation par exemple. De manière générale, il salue la création d’une forme de maison de la culture, qui va bien au-delà de la bibliothèque classique. « J’ai un regard très positif sur le projet en soi », dit-il.

Les acteurs interrogés apprécient d’avoir été associés au processus dès les premières discussions. « Les utilisateurs ont été pris en compte dès le début. C’est exemplaire », souligne Ilan Vallotton. L’avenir de cette Bibliothèque de Neuchâtel est désormais entre les mains du Conseil général. /sbm