CSEM : un projet européen de panneaux solaires veut faire de l’ombre à l’Asie

Après quatre ans de développement, le projet Hiperion, coordonné par le CSEM, a présenté ce ...
CSEM : un projet européen de panneaux solaires veut faire de l’ombre à l’Asie

Après quatre ans de développement, le projet Hiperion, coordonné par le CSEM, a présenté ce jeudi sa ligne de production pilote de nouveaux panneaux solaires plats, « les plus efficaces au monde » selon les chercheurs. L’industrialisation pourrait prendre plusieurs années

Jacques Levrat, CSEM, coordinateur du projet européen Hiperion, pose devant le panneau solaire hybride développé ces quatre dernières années. Jacques Levrat, CSEM, coordinateur du projet européen Hiperion, pose devant le panneau solaire hybride développé ces quatre dernières années.

Ils seraient les « panneaux solaires photovoltaïques plats les plus efficaces du monde », selon leurs concepteurs, avec un rendement de plus de 29%, contre 15 à 22% pour les panneaux conventionnels lors d’un ensoleillement direct.

Le projet européen Hiperion, subventionné par l’Union européenne pour 10,6 millions d'euros, vient de s’achever après quatre ans de développement. Dans les entrailles du technopôle Innoparc à Neuchâtel, les responsables du projet coordonnée par le Centre suisse d'électronique et de microtechnique (CSEM) présentaient ce jeudi leur ligne de production pilote, formée de quatre machines. La dernière étape de leur projet et une marche importante pour Hiperion, enfin prête pour une industrialisation.

Jacques Levrat : « Ces panneaux sont très spéciaux, car ils contiennent deux types de cellules solaires »

Sur les toits des immeubles ou dans l’agriculture

Pour arriver à ces rendements dépassant la concurrence, ces panneaux allient deux technologies des panneaux solaires actuels :

  • Le photovoltaïque classique que l’on retrouve sur nos toits, qui récolte autant la lumière directe que la lumière diffuse (par exemple quand le temps est nuageux)
  • Le photovoltaïque concentré, une technologie spatiale, qui est plus efficace mais ne fonctionne qu’avec un ensoleillement direct.

En utilisant ces deux technologies, les panneaux hybrides d’Hiperion produisent une plus grande quantité d’énergie lors d'un ensoleillement direct. D’autant plus que sous les lentilles focalisant cette énergie, les cellules solaires bougent pour suivre la direction de l’astre. Et quand le ciel est voilé, c’est le panneau solaire classique qui prend le relais, assurant un rendement de panneau classique, bien que légèrement affaibli de 10% à cause du verre des lentilles.

La surface du panneau solaire d'Hiperion. Les lentilles servent à concentrer les rayons du soleil. La surface du panneau solaire d'Hiperion. Les lentilles servent à concentrer les rayons du soleil.

Le panneau d’Hiperion, plus efficace, est particulièrement utile quand la surface est restreinte et les besoins en puissance élevés, explique Jacques Levrat. « On voit deux applications. Mettre les panneaux sur des immeubles de plus de trois étages, car à partir de là, la production des panneaux classiques sur le toit ne suffit plus à alimenter tout l’immeuble. Ou les installer sur les bornes de recharge des voitures électriques, où il faut aussi beaucoup de puissance ».

Autre exemple d'applicattechnologie qui permet de suivre le soleil a déjà pu être utilisée par la start-up Insolight, collaborant avec Hiperion, dans l’agrivoltaïsme. Des panneaux solaires posés au-dessus des plantes renvoient à choix le soleil vers les plantes quand elles en ont besoin et vers le panneau le reste du temps.

Jacques Levrat, sur l'agrovoltaïsme : « On peut dire au panneau de ne pas envoyer le soleil vers les cellules, mais vers les plantes. »»

Vers l’industrialisation

Le projet Hiperion est achevé, après quatre ans de travail, et prêt pour l’industrialisation, comme l’explique Jacques Levrat : « On classifie de 1 à 9 l’échelle de proximité du marché. 1 c’est une idée, 2 c’est un prototype de laboratoire. Nous sommes arrivés à 7 : on a démontré la technologie dans un environnement réel et ça nous permettra d’arriver au niveau suivant, l’industrialisation. Nous avons aussi montrer que nous pouvons produire et installer des panneaux fiables pour 25 ans ».

Il reste toutefois des points d’améliorations, mais rien d’insurmontable pour l’ingénieur : « la taille du panneau n’est pas encore celle du marché final, il fait un peu moins d’un mètre carré, alors que les panneaux classiques en font plutôt deux. Et quelques petits bugs de jeunesses restent à régler ».

Finalement, pour passer à une production massive, il faudra investir de l’argent dans ces technologies. La balle est dans le camp des politiques et de l’industrie, précise Jacques Levrat. Le CSEM est à disposition.

L'une des quatre machines prototypes pour l'industrialisation, dans les sous-sols d'Innoparc. Celle-ci sert à tester l'efficacité du panneau. L'une des quatre machines prototypes pour l'industrialisation, dans les sous-sols d'Innoparc. Celle-ci sert à tester l'efficacité du panneau.

Ramener le savoir-faire photovoltaïque en Europe

Ce projet a reçu un financement européen à hauteur de 10,6 millions d'euros. Sa mission : relancer l’industrie photovoltaïque européenne, face à un marché dominé par l’Asie, en innovant et créant des « produits de rupture ». Jacques Levrat détaille : « Tout vient d’Europe dans notre projet, nous avons le savoir-faire. Mais pour concurrencer la Chine sur des panneaux solaires standards, il faudrait ramener en Europe beaucoup d’industries : celle du verre, du silicium, des cellules solaires… La dépendance est quasi-totale vis-à-vis de l’Asie ».

Et si l’abandon de l’accord-cadre UE-Suisse en 2021 a mis à mal la collaboration dans la recherche européenne, Hiperion, lancé avant, ne l’a pas subi selon Jacques Levrat. Mais il souligne qu’« aujourd’hui notre rôle dans ce projet ne pourrait plus exister. La Suisse ne pourrait plus être coordinatrice. Ça aura un impact sur les projets futurs. » /mde


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