Les Suisses qui entreprennent des démarches d’adoption à l’étranger sont inquiets. Le Conseil fédéral veut y mettre fin pour prévenir les abus. Si le chef du service de protection de l’adulte et de la jeunesse du canton de Neuchâtel soutient cette mesure, la présidente de l’association « Adoptons-Nous » y voit tout simplement la fin de l’adoption.
La récente volonté du Conseil fédéral de mettre fin aux adoptions internationales suscite la controverse parmi les professionnels du domaine. Selon le gouvernement, malgré les efforts pour sécuriser le processus d’adoption, des abus persistent. Mercredi dernier, il a chargé le Département fédéral de la justice et de la police d'élaborer un projet pour la fin 2026, visant à lutter contre les abus liés au manque de transparence et aux conditions douteuses dans ce domaine. Ce processus impliquera des débats et consultations avec les autorités concernées.
Une mauvaise image de l’adoption
En réaction à cette volonté, Nathalie Allaman, présidente de l’association « Adoptons-Nous & Accueil Familial », fait part de son inquiétude et de sa déception. Elle considère que les abus survenus dans les années 1970-1980 ne justifient pas une mesure aussi radicale. Selon elle, « des dispositifs de protection stricts ont été mis en place, tant dans les pays d'origine qu’en Suisse ». D’ailleurs, cette mesure suscite des inquiétudes parmi ceux qui envisagent l’adoption ou qui sont en démarche. Depuis mercredi passé, l’association reçoit un nombre important d’appels et de courriels.
Nathalie Allaman : « Quelle image est-ce qu'on donne de l'adoption ? »
Pour les personnes qui n’ont pas encore commencé les démarches, Nathalie Allaman précise : « Très honnêtement, c’est un parcours qui risque d’être particulièrement difficile et qui ne risque pas d’aboutir ». Elle expose d’autres projets d’orientations comme la famille d’accueil ou le don d’ovule.
Nathalie Allaman : « Sur le canton de Neuchâtel, on est passablement impliqué dans les familles d'accueil. »
Une mesure attendue et bénéfique
De son côté, Christian Fellrath, chef du service de protection de l’adulte et de la jeunesse du canton de Neuchâtel, annonce qu’une telle mesure était espérée. « Elle a bien été accueillie par les professionnels », souligne-t-il, car elle répond à des difficultés liées à la vérification des informations provenant des pays d’origine des enfants.
Christian Fellrath : « J'ai vu de mes propres yeux des mamans déposer leurs enfants à l'orphelinat. »
Le chef du service précise qu’un « argument colonialiste » a longtemps prévalu, selon lequel les enfants seraient mieux en Suisse grâce à son système éducatif, financier et sanitaire. « Vu avec cette simple lunette, c’est vrai, mais avec un peu de recul, cela ne suffit plus », ajoute-t-il. Il estime que la Convention relative aux droits de l’enfant nécessite d’adopter une perspective plus large, en reconnaissant que l’équilibre de l’enfant ne repose pas uniquement sur des facteurs matériels, mais aussi sur des éléments immatériels, tels que le lien biologique avec sa famille et ses racines, qui doivent désormais être pris en compte.
L’avenir de l’adoption internationale
La présidente craint que la mise en place de cette mesure entraîne la fin de l’adoption : « Il y aura de moins en moins d’adoptions et je pense que cela va progressivement cesser », conclut-elle. Les deux intervenants s’accordent à dire que le don d’ovules pourrait constituer une alternative à l’adoption internationale. /lal