L'exposition « x’áí xàì » est le fruit d’une collaboration entre des étudiants de l’Institut d’ethnologie, le Musée d’ethnographie de Neuchâtel et des artistes africains. Elle propose une réflexion profonde sur l'art et sur les relations nord-sud dans les musées contemporains
Des dizaines d'oeuvres d'art San sont à découvrir au Musée d'ethnographie de Neuchâtel jusqu'en avril 2024. (photo : MEN)
Une exposition unique en son genre, créée par des étudiants de l'Institut d'ethnologie de l'Université de Neuchâtel, le Musée d’ethnographie de Neuchâtel (MEN) et des artistes du Kuru Art Project (D’Kar, Botswana), a été inaugurée récemment sous un titre énigmatique en langue naro. « x’áí xàì », une exposition qui va bien au-delà de la simple présentation artistique, invite les visiteurs à réfléchir aux nouvelles formes d'expression picturale émergées dans les années 1990 parmi les populations naro d'Afrique australe, et à la manière dont les musées peuvent les utiliser à une époque où les rapports nord-sud sont vivement remis en cause.
L'exposition est principalement composée de lithographies et de peintures d’art San. Celles-ci font partie d’une donation faite en 2020 au MEN par l’anthropologue zurichoise Irène Staehelin. Aux oeuvres s'ajoutent des questionnements, des propositions de mise en contexte et les paroles des créateurs expliquant leurs intentions artistiques. L'espace d'exposition se trouve divisé en deux parties distinctes : la vision occidentale des œuvres et leur contexte de création. L'idée initiale était de créer une perméabilité entre ces deux espaces. À chaque point de l'exposition, un autre aspect se révèle aux visiteurs, offrant ainsi une expérience immersive des plus captivantes « et une autre perspective », selon Julien Glauser, conservateur au MEN.
Julien Glauser :
En observant ces œuvres, de nombreux éléments nous échappent. Les descriptions fournies dévoilent une profondeur d'informations qui entoure ces créations artistiques. L'exposition vise précisément à mettre en lumière cette richesse auprès des visiteurs. Parallèlement, elle explore la relation entre l'Afrique et les artistes africains exposés en Europe, sans leur présence physique.
Plusieurs artistes naro d'Afrique australe ont notamment participé à la confection de l'affiche de l'exposition « x’áí xàì ». (Photo : MEN)
Du point de vue pédagogique, cette collaboration a été une réussite, transcendant les idéaux théoriques pour prendre vie. Elle a été l'occasion de confronter les participants aux défis liés à la construction d'un dialogue à travers une distance de 10 000 kilomètres, entre la Suisse et le Botswana, avec toutes les contraintes techniques et temporelles que cela implique. « Des choses qui paraîtraient évidentes chez nous ne le sont pas forcément ailleurs », explique l’étudiant Valère Lens, « on a une facilité avec les technologies qui n’est pas pareille chez tout le monde ».
Valère Lens :
Pour les artistes, il s'agissait de leur première expérience de création en interaction avec des commissaires d'exposition, en vue d'une exposition dédiée à leur art. « De ce point de vue là, ce fut une ouverture sur un champ des possibles qu’ils n’avaient pas jusqu’à présent », précise Leïla Baracchini, postdoctorante FNS.
Leïla Baracchini :
L'exposition « x’áí xàì » se tiendra jusqu’au 14 avril 2024 au Musée d’ethnologie de Neuchâtel. /dsa
