Didier Burkhalter : « Les problèmes à résoudre ne sont pas vraiment différents »

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Didier Burkhalter : « Les problèmes à résoudre ne sont pas vraiment différents »

« La méfiance a encore grandi – de même que le danger » entre les différentes parties en présence dans la crise ukrainienne. C’est la lecture qu’en fait l’ancien conseiller fédéral et président de l’OSCE

Lorsqu’il présidait l’OSCE, Didier Burkhalter (à gauche) a notamment rencontré le président russe Vladimir Poutine (à droite) en 2014. (Photo : archives / kremlin.ru) Lorsqu’il présidait l’OSCE, Didier Burkhalter (à gauche) a notamment rencontré le président russe Vladimir Poutine (à droite) en 2014. (Photo : archives / kremlin.ru)

« Je suis convaincu, aujourd’hui comme hier, que la diplomatie déploie tous ses effets constructifs lorsqu’elle se développe dans l’action d’abord discrète ». C’est l’une des réflexions de Didier Burkhalter au sujet de la crise qui frappe l’Ukraine. L’ancien Conseiller fédéral neuchâtelois a présidé l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe en 2014. Nous l’avons contacté afin qu’il nous partage sa lecture de la situation.

Le Neuchâtelois rappelle qu’il s’est beaucoup investi dans la présidence de l’OSCE : « J’ai beaucoup aimé apporter toute mon énergie dans la fonction présidentielle et de membre de la Troïka pendant trois ans pour contenir chaque jour la crise ukrainienne afin qu’elle n’embrase pas le continent européen ».- Mais cette époque, c’est aussi beaucoup de souvenirs, notamment le moment où l’institution a décidé d’envoyer une mission spéciale d’observation en Ukraine : « Que d’émotions en voyageant dans cette région du monde et auprès de tous les acteurs de la crise de l’époque ! Que de moments inoubliables, comme par exemple ce 21 mars 2014, premier jour du printemps, lorsque tous les pays de l’OSCE ont accepté l’envoi d’une Mission spéciale d’observation [alors que l’OSCE ne peut agir qu’à l’unanimité de ses membres] ».

Des souvenirs de Crimée

Quels parallèles peut-on tirer avec le rattachement de la Crimée à la Russie en février 2014 ? « Aujourd’hui, les problèmes à résoudre ne sont pas vraiment différents de ceux qui étaient en cause il y a plusieurs années. À la fin de la présidence suisse de l’OSCE, nous avons obtenu de lancer un groupe de travail pour ouvrir des pistes de solution entre l’Est et l’Ouest en la matière. L’idée était d’anticiper la prochaine crise… […] Il existe de profondes différences culturelles entre la Russie et l’Occident sur la perception de l’histoire. Nous sommes alors partis du principe qu’il fallait éviter de juger ces différences-là dans le passé, mais tenter de les surmonter pour le futur. Pour qu’un tel travail consciencieux et lucide sur les incroyables différences de perception et de narration de l’histoire aboutisse à une détente concrète et durable, il eut fallu qu’il soit accompagné d’une forte volonté politique de rapprochement. Cela n’a pas été le cas ces dernières années et la méfiance a encore grandi – de même que le danger – là même où il est indispensable de construire sans cesse des ponts de confiance ».

Quant à l’avenir immédiat, l’ancien ministre s’interroge : « Les parties en présence comprendront-elles qu’elles ont toutes un noble intérêt, à plus ou moins long terme, à cesser les invectives pour aborder en négociation les véritables questions qui dérangent (l’interprétation divergente des principes fondamentaux de la sécurité européenne, le rôle et l’évolution de l’Otan, les partenariats économiques, énergétiques et stratégiques entre l’Est et l’Ouest, les mesures de confiance, tout spécialement en matière de désarmement, etc., sans compter, par ailleurs, la nécessaire collaboration internationale sur les enjeux globaux ? »


Le dialogue a-t-il encore une place ?

Désormais, la diplomatie a-t-elle encore une chance de permettre de résoudre la crise ? « Je suis convaincu, aujourd’hui comme hier, que la diplomatie déploie tous ses effets constructifs lorsqu’elle se développe dans l’action d’abord discrète et dans des apparitions publiques modestes et uniquement nécessaires sur le fond de la cause ».

Didier Burkhalter nous a répondu par écrit. L’ancien conseiller fédéral et président de l’OSCE ne souhaite pas accorder d’interview afin de garder les distances qu’il juge nécessaires avec la vie politique et fédérale. Le Neuchâtelois ne souhaite pas que d’éventuelles « positions publiques puissent être exploitées contre les autorités » dont il a fait partie. /aju


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