Il est urgent de traduire en justice les responsables des crimes commis en Syrie, a affirmé mardi à Genève l'ex-procureure Carla Del Ponte lors d'un débat du Conseil des droits de l'homme avec la commission d'enquête de l'ONU. La commission en appelle à reprendre les négociations de Genève.
"Il est absolument urgent de saisir la justice", a déclaré lors d'une conférence de presse la Tessinoise, membre de la commission d'enquête présidée par Paulo Pinheiro.
"Je serais heureuse d'être procureure au sein de ce tribunal. Nous avons recueilli un grand nombre de preuves", a ajouté Carla Del Ponte, qui a déjà été procureure générale des Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda (TPIR) et l'ex-Yougoslavie (TPI).
La liste des criminels de guerre s'allonge, a indiqué Carla Del Ponte de retour d'un voyage dans les pays voisins de la Syrie. Une quatrième liste d'individus et organes suspectés d'avoir commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, y compris aux échelons les plus élevés, a été déposée sous scellés au Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme.
Interrogée sur le nombre de victimes de la guerre, Carla Del Ponte a expliqué qu'il est très difficile d'avoir une idée exacte de l'extérieur du pays, tout en articulant le chiffre de 100'000 à 200'000 morts.
Paulo Pinheiro a précisé que la nouvelle liste des suspects contient "les noms de responsables d'agences de services de renseignements et de centres de détention où les prisonniers sont torturés, les noms de chefs militaires qui prennent des civils pour cible, de responsables d'aéroports à partir desquels des bombardements à l'aide de barils d'explosifs sont planifiés et exécutés et de groupes armés impliqués dans des attaques de civils".
Pour la première fois des crimes contre l'humanité ont été documentés parmi les groupes armés les plus extrémistes de l'opposition.
Le président de la commission d'enquête de l'ONU a lancé devant le Conseil un appel pressant à reprendre les négociations de Genève sur un règlement politique du conflit.
"La compassion ne doit pas et ne peut pas suffire. Nous ne pouvons pas continuer à rester assis pendant des années dans cette salle en écrivant des rapports et en tenant des discours nous lamentant sur le sang qui coule dans les rues de la Syrie", a affirmé Paulo Pinheiro.