Le tribunal de Munich a mis fin au procès pour corruption du patron de la F1 Bernie Ecclestone contre un paiement de 100 millions de dollars (90,6 millions de francs) par le prévenu. La décision suscite un tollé en Allemagne. Déplorant qu'on puisse "acheter la justice", certains réclament un changement de législation.
"La procédure est arrêtée, en accord avec le parquet et le prévenu, conformément à l'article 153a" du code de procédure pénale qui régit ce type de négociations, a déclaré Peter Noll, le président du tribunal.
Bernie Ecclestone, 83 ans, était accusé d'avoir versé en 2006 et 2007 44 millions de dollars de pots-de-vin présumés au banquier allemand Gerhard Gribkowsky, qui travaillait pour la banque publique bavaroise Bayern LB. Ceci en vue de conclure la vente des droits de la F1 au fonds d'investissement CVC Capital Partners.
M. Ecclestone dispose d'une semaine pour verser les 100 millions de dollars, dont 99 millions iront dans les caisses de l'Etat régional de Bavière et 1 million dans celles d'une fondation d'aide à l'enfance.
Avec cet accord, le casier judiciaire d'Ecclestone demeure vierge, ce qui lui permet de continuer à diriger la Formule Un.
Paradoxalement, la défense a monnayé un abandon des poursuites alors qu'Ecclestone n'a cessé de nier les charges contre lui.
Il ne contestait pas le paiement de 44 millions de dollars à M. Gribkowsky. Mais il présentait cela comme le "prix du silence" pour que ce dernier ne fasse pas de révélations gênantes sur son patrimoine au fisc britannique. Entendu à la mi-mai, le banquier allemand a maintenu ses accusations de corruption.
L'homme d'affaires britannique, un fils d'ouvrier dont la fortune tourne autour de quatre milliards d'euros, va pouvoir poursuivre son règne sur le monde de la F1 entamé il y a quarante ans, et qui lui a valu un soutien appuyé du monde du sport automobile.
Sans attendre la décision des juges bavarois, l'ancien champion du monde Niki Lauda avait salué dès samedi le retour de Bernie Ecclestone aux manettes de la F1. "Il est le seul qui connaît tout, les affaires, les problèmes des équipes, il a tout en tête", se réjouissait l'ex-pilote autrichien.
L'arrêt du procès après quatre mois d'audience, pour un montant sans précédent, a suscité beaucoup moins d'enthousiasme en Allemagne. Déplorant qu'on puisse "acheter la justice", certains médias et responsables politiques ont réclamé un changement de législation.
"Quelles que soient sa situation financière et sa place dans la société, chacun doit rendre des comptes", avait notamment martelé l'ex-ministre de la Justice Sabine Leutheusser-Schnarrenberger (parti libéral FDP). Elle a plaidé pour une "restriction drastique" de ces négociations par la loi.