Un ouvrage qui tisse des liens entre la littérature médiévale et la Romandie. Le professeur de littérature française du Moyen Âge aux Universités de Neuchâtel et de Lausanne, Alain Corbellari, a consacré son dernier livre aux textes et aux personnages médiévaux qui font écho à l’actuel territoire romand. On y croise le Roi Arthur qui, dans certains recueils, serait mort lors d’un combat contre le chat de Lausanne, mais aussi Othon de Grandson, poète qui a instauré la tradition de la Saint-Valentin.
Avec ce travail, Alain Corbellari dit avoir voulu étoffer la section « Moyen Âge » des ouvrages d’histoire littéraire consacrés à la Suisse romande, généralement réduite à un « chapitre succinct ».
L’auteur se penche ainsi sur la figure du comte Rodolphe II, seigneur de Neuchâtel, qui a laissé une trace importante dans la littérature médiévale. Celui-ci est à l’origine de neuf chansons courtoises, rédigées toutefois en allemand. « Il est l’un des tout premiers Minnesänger, soit l’équivalent germanique de ce que l’on appelle en France les troubadours dans le Sud et les trouvères dans le Nord », indique Alain Corbellari.
Alain Corbellari : « Grâce à Neuchâtel, le lyrisme allemand a pu fleurir »
Dans son livre, le professeur revient aussi sur la fausse Chronique des Chanoines qui prétend couvrir la période allant de 1377 à 1516, mais qui a en fait été rédigée par un notable neuchâtelois en 1777. Celui-ci « voulait montrer que les Neuchâtelois avaient toujours été très proches des Suisses. Tout cela pour essayer de montrer que Neuchâtel devait naturellement rejoindre l’orbite helvétique », explique Alain Corbellari. La supercherie a été mise au jour par le philologue neuchâtelois Arthur Piaget au XIXe siècle, non sans créer certains remous en Suisse.
Quand certains préfèrent la légende à la vérité
L’ouvrage évoque par ailleurs l’incarcération de Benedetto da Piglio à la Tour des Prisons de Neuchâtel durant plusieurs mois en 1415. Cet humaniste italien a été arrêté à son retour du Concile de Constance au cours duquel il avait apporté son soutien à un cardinal. L’homme a livré un récit de sa captivité, mais aussi de sa tentative d’évasion.
Alain Corbellari : « C’est un texte absolument fascinant »
Au travers de courts chapitres, Alain Corbellari s’attelle ainsi à réunir diverses pièces d’un puzzle éparpillées parfois bien au-delà des frontières romandes et offre une balade accessible à un large public aux côtés de figures qui ont marqué la région au Moyen Âge. /sbm