Deux présidents se faisaient face jeudi au Venezuela après que le président du Parlement vénézuélien, contrôlé par l'opposition, s'est autoproclamé mercredi 'président' par intérim du pays. Des heurts ont éclaté, faisant au moins 13 morts en deux jours, selon une ONG.
Le président du Parlement Juan Guaido a immédiatement été reconnu comme le président du Venezuela par les Etats-Unis et ses alliés dans la région. Mais l'armée vénézuélienne, soutien indéfectible du président socialiste Nicolás Maduro, a rejeté son autoproclamation.
'L'armée défend notre constitution et est garante de la souveraineté nationale', a affirmé le ministre de la défense, Vladimir Padrino. A la suite de l'annonce, des heurts ont éclaté entre les forces de l'ordre et des partisans de l'opposition à Caracas, selon des journalistes de l'AFP.
'Je jure d'assumer formellement les compétences de l'exécutif national comme président en exercice du Venezuela pour parvenir (...) à un gouvernement de transition et obtenir des élections libres', a lancé Juan Guaido devant des dizaines de milliers de partisans réunis à Caracas pour protester contre Nicolás Maduro.
Relations diplomatiques rompues
Le président américain Donald Trump a immédiatement annoncé dans un communiqué qu'il reconnaissait officiellement le jeune opposant de 35 ans comme 'président par intérim du Venezuela'.
En réponse, le président Maduro a annoncé que son pays rompait ses relations diplomatiques avec 'le gouvernement impérialiste des États-Unis', donnant 72 heures aux représentants diplomatiques nord-américains pour quitter le pays.
La Colombie et le Brésil, alliés de Washington dans la région, ont emboîté le pas à la Maison-Blanche, ainsi que l'Argentine, le Chili, le Paraguay et le secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA), Luis Almagro.
En revanche, Cuba a fait part de son 'ferme soutien' à Nicolás Maduro face à une 'tentative de coup d'État'. Et le Mexique du président de gauche, Andrés Manuel López Obrador, a indiqué maintenir son soutien au dirigeant socialiste, reconnaissant 'les autorités élues selon la constitution vénézuélienne'.
L'UE veut des élections
Sans aller jusqu'à la reconnaissance du président autoproclamé, l'Union européenne a appelé à écouter la 'voix' du peuple du Venezuela et a réclamé des élections 'libres et crédibles'. L'UE espère lancer en février un groupe international de contact pour tenter de trouver une sortie à la crise, a indiqué la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.
Peu avant la proclamation de M. Guaido, la cour suprême vénézuélienne, plus haute juridiction du pays, composée de fidèles au régime, a annoncé avoir ordonné une enquête pénale contre les membres du Parlement. Elle les a accusés d'usurper les prérogatives du président Maduro.
Opposants et partisans de Nicolás Maduro sont descendus en masse dans les rues mercredi dans tout le pays, dans un climat de haute tension. Sept personnes sont mortes dans des troubles précédant les manifestations.
Selon l'observatoire vénézuélien des conflits sociaux (OVCS), une organisation d'opposition au président Maduro, treize personnes ont été tuées dans le cadre des manifestations antigouvernementales en deux jours.
Les pro-Maduro se rassemblent
De leur côté, les partisans du gouvernement, habillés de rouge pour la plupart, se sont retrouvés dans d'autres points de la capitale pour apporter leur soutien au chef de l'Etat. Ils ont rejeté les revendications de l'opposition, qu'ils considèrent comme une tentative de coup d'Etat orchestrée par Washington.
Les commerces, écoles et institutions sont restés fermés mercredi, tandis que de rares véhicules étaient visibles dans les rues. Les violentes manifestations de 2017 qui ont fait 125 morts sont encore dans toutes les mémoires.
Ces mobilisations étaient organisées dans un climat explosif, deux jours après le bref soulèvement d'un groupe de 27 militaires qui se sont retranchés quelques heures dans une caserne du nord de Caracas, en lançant des appels à l'insurrection. Ils ont rapidement été arrêtés.
Le président vénézuélien a été investi le 10 janvier pour un deuxième mandat, contesté par l'opposition et non reconnu par les Etats-Unis, l'Union européenne et de nombreux pays d'Amérique latine.
/ATS