L'ex-président islamiste égyptien Mohamed Morsi a été condamné mardi dans un premier procès à 20 ans de prison pour des violences. Mais il a échappé à la peine de mort que beaucoup prédisaient à l'aune de l'implacable répression visant son mouvement.
Le verdict a été annoncé lors d'une audience retransmise à la télévision. Mohamed Morsi, premier président démocratiquement élu en Egypte, en juin 2012, a la possibilité de faire appel.
Douze autres cadres des Frères musulmans, dont le secrétaire général de la confrérie Mohamed el Beltagy et l'ancien parlementaire Essam el Erian, ont été condamnés à la même peine. Les prévenus ont été reconnus coupables de violence, d'enlèvements, de torture mais acquittés de l'accusation de meurtre, passible de la peine capitale.
A l'annonce du verdict, les condamnés, enfermés dans une cage, ont fait le salut à quatre doigts symbolisant la résistance contre la répression subie par les Frères musulmans et scandé: 'Dieu est le plus grand'.
'Parodie de justice'
L'ONG Amnesty International a qualifié la sentence de 'parodie de justice'. Elle a demandé que Mohamed Morsi soit rejugé par un tribunal civil ou libéré.
A Istanbul, un ancien ministre du gouvernement Morsi, Amr Darrag, a dénoncé lui aussi une 'parodie de justice scénarisée et contrôlée par le gouvernement'. A l'en croire, la peine rendue contre Morsi vise à tester la réaction de la communauté internationale. Des sentences plus lourdes tomberont si celle-ci ne réagit pas avec vigueur.
Dirigeants renouvelés
Les Frères musulmans ont renouvelé leurs dirigeants et, faisant ainsi preuve de résilience, demeureront une force de premier plan, dit-il. 'Il y a eu des milliers d'Egyptiens jetés en prison et tués, dont des chefs des Frères musulmans, mais cela a entraîné un renouvellement en profondeur des instances dirigeantes', a affirmé l'ancien ministre en parlant de 60 à 70% des dirigeants renouvelés.
Les procureurs accusaient Mohamed Morsi d'avoir, avec d'autres dirigeants des Frères musulmans, encouragé des violences qui ont abouti à la mort de manifestants en décembre 2012, dont des pro-Morsi, dans les semaines ayant suivi la publication d'un décret élargissant ses prérogatives de chef de l'Etat.
Coup d'Etat
L'ex-président rejette ces charges. Il continue de voir dans sa destitution, survenue après des manifestations massives contre son exercice du pouvoir, un coup d'Etat.
Son fils Oussama Morsi a assuré que son père ferait tout pour revenir au pouvoir. 'Il sait très bien qu'il est investi d'une mission. Cette mission est le retour de la démocratie que nous avons obtenue lors de la révolution du 25 janvier (2011)', a-t-il dit.
Mohamed Morsi a été renversé par le chef d'état-major de l'armée, Abdel Fattah al Sissi. Ce dernier s'est depuis fait élire à la présidence du pays et a mené une répression implacable contre les Frères musulmans tout en bénéficiant du soutien de nombreux Egyptiens avides de stabilité.
Voies discordantes réprimées
La confrérie dit prôner une résistance pacifique mais a été bannie et qualifiée en décembre 2013 d'organisation terroriste par le nouveau pouvoir.
La répression s'est étendue aux autres voix discordantes, dont plusieurs figures de proue de la 'révolution du Nil' qui a conduit à la chute du président Hosni Moubarak en février 2011. De fait, le régime de M. Sissi est considéré par les organisations de défense des droits humains comme bien plus répressif que celui de M. Moubarak.
Mohamed Morsi est poursuivi dans plusieurs autres dossiers, et encourt la peine de mort dans trois procès sur quatre. Il est notamment accusé d'avoir organisé une évasion collective d'une prison du Caire durant le soulèvement de 2011, ainsi que l'enlèvement et le meurtre de gardiens.
Il est également accusé d'avoir conspiré avec le Hamas palestinien et le Hezbollah libanais pour commettre des violences dans la péninsule du Sinaï après sa destitution, et d'avoir divulgué des secrets d'Etat à l'émirat du Qatar, son allié lorsqu'il était au pouvoir.
/ATS