Gabriel Attal, devenu mardi à 34 ans le plus jeune chef du gouvernement de l'histoire de la République française, a présenté sa nomination, censée relancer le quinquennat d'Emmanuel Macron, comme un symbole d''audace' et de 'mouvement'.
'J'aurai l'objectif de garder le contrôle de notre destin et libérer notre potentiel français', a-t-il déclaré lors de la passation de pouvoir avec Elisabeth Borne qui l'a précédé dans la fonction, en indiquant qu'il réunirait les 'forces vives du pays' cette semaine.
Arrivé à pied à l'hôtel de Matignon, siège du bureau et de la résidence des premiers ministres, où il a embrassé Mme Borne, Gabriel Attal, visiblement à l'aise dans ses nouveaux habits, a annoncé son intention de conserver l'Education nationale, dont il avait jusqu'alors la charge, au coeur de son action, en affirmant que 'la cause de l'école' demeurait la 'mère des batailles' françaises.
Souriante, Mme Borne, qui a remis sa démission lundi soir après 20 mois houleux à la tête du gouvernement, a défendu son bilan : 'j'ai tenu sans trembler le cap fixé par le président de la République', a déclaré l'ex-première ministre qui a fait adopter des réformes difficiles et affronté une trentaine de motions de censure.
Deuxième femme seulement à occuper le poste de chef de gouvernement dans la Ve République, elle a lancé à l'adresse des femmes: 'l'avenir vous appartient', avant de quitter la scène.
Relancer le quinquennat
A trois ans de la fin de son second mandat, le président Emmanuel Macron se trouve dans une situation délicate face à la percée continue de l'extrême droite dans le pays et en l'absence de majorité absolue à l'Assemblée nationale.
Depuis sa réélection en 2022, il est aussi confronté à un mécontentement croissant qui s'est manifesté lors de l'adoption de la réforme des retraites et, plus récemment, d'une loi très controversée sur l'immigration qui a fracturé le camp présidentiel.
'Cher Gabriel Attal, je sais pouvoir compter sur votre énergie et votre engagement pour mettre en oeuvre le projet de réarmement et de régénération que j'ai annoncé', dans un esprit de 'dépassement et (d')audace', a loué le chef de l'Etat français sur X.
L'ambitieux nouveau premier ministre, qui fut porte-parole du gouvernement lors du premier quinquennat, est parfois vu comme un clone du président, en raison de sa jeunesse et de son ascension spectaculaire.
M. Attal a exprimé des remerciements appuyés au chef de l'Etat dans sa première prise de parole à Matignon.
Décrit comme un 'bon élève', Gabriel Attal, entré au gouvernement en 2018, est un macroniste de la première heure.
Cet homme, qui ne fait pas mystère de son homosexualité, était devenu la personnalité la plus populaire du gouvernement et de la majorité, convainquant un Français sur deux.
Le chancelier allemand Olaf Scholz l'a félicité mardi sur X: 'je me réjouis de poursuivre et de renforcer notre coopération', a-t-il écrit.
'Ambition'
En France, le président fixe en principe les grandes orientations du quinquennat. Le Premier ministre, responsable de la mise en oeuvre du programme et de la gestion quotidienne du gouvernement, paie généralement les pots cassés en cas de turbulences.
Après deux mandats, Emmanuel Macron ne pourra pas se représenter en 2027 et un enjeu crucial sera d'empêcher la figure de proue de l'extrême droite, Marine Le Pen, d'accéder à la présidence.
Pour le constitutionnaliste Benjamin Morel, le choix de cette personnalité symbolise aussi une 'stratégie très offensive en vue des élections européennes' de juin, où l'extrême droite est donnée gagnante en France.
Gabriel Attal incarne 'la jeunesse, l'ambition, ça évoque un peu en toile de fond le Macron du départ, un briseur de code', selon le politologue Bruno Cautrès, même si sa nomination 'ne réglera pas le problème de la majorité', ni celui du 'cap principal du mandat'.
A la tête de l'Education nationale depuis juillet 2023, le ministre, omniprésent, a séduit les populations âgées qui constituent le coeur de l'électorat de la majorité présidentielle avec ses prises de position en faveur de l'uniforme ou l'interdiction de l'abaya à l'école.
Gabriel Attal est le quatrième premier ministre nommé depuis 2017 par Emmanuel Macron, régulièrement accusé par ses détracteurs de concentrer les pouvoirs et faire de la micro-gestion.
'Les Français ne peuvent rien espérer' du nouveau premier ministre, a réagi mardi Marine Le Pen, en évoquant sur X un 'ballet puéril des ambitions et des égos'.
'La fonction de Premier ministre disparaît. Le monarque présidentiel gouverne seul avec sa cour', a de son côté dénoncé Jean-Luc Mélenchon, le leader de la gauche radicale, sur X.
/ATS