La Chine a accentué vendredi son offensive pour imposer sa volonté à Hong Kong. Avec une réforme électorale qui lui permettra d'écarter des élections les candidats de l'opposition pro démocratie.
Sous les drapeaux rouges du Palais du peuple, le parlement chinois a ouvert sa grand-messe annuelle, la session plénière de l'Assemblée nationale populaire (ANP). Comme chaque année, les quelque 3000 députés approuveront d'ici jeudi comme un seul homme les textes soumis par le Parti communiste au pouvoir (PCC).
La session est traditionnellement l'occasion pour le régime chinois d'afficher ses réalisations. Cette année, dans un discours-fleuve, le Premier ministre Li Keqiang a revendiqué la quasi-éradication du Covid-19, l'élimination de la pauvreté absolue et le redémarrage de l'économie.
'Nos réussites, qui ont reçu l'approbation de notre peuple et une reconnaissance mondiale, entreront dans l'Histoire', a-t-il assuré, avant d'annoncer une croissance économique d'au moins 6% pour le géant asiatique en 2021.
Dernier clou dans le cercueil
L'an dernier, la session parlementaire avait été dominée par la question de Hong Kong, l'ex-colonie britannique secouée en 2019 par des manifestations monstres contre l'emprise de Pékin. Le parlement chinois avait alors imposé à la région autonome une loi sur la sécurité nationale qui a étouffé la contestation.
Cette semaine, 47 militants démocrates ont été emprisonnés sous l'accusation de 'subversion' prévue par cette loi. Hong Kong retrouve le devant de la scène, avec un projet de réforme électorale qui devrait être voté jeudi par les députés chinois.
Les opposants au régime communiste y voient le dernier clou dans le cercueil de la démocratie à Hong Kong. 'Si ces mesures sont adoptées, et elles le seront certainement, la voix de l'opposition sera bâillonnée', observe le sinologue Willy Lam, de l'Université chinoise de Hong Kong. 'Cela éliminera ce qui reste de l'opposition'.
Termes de la rétrocession violés
Malgré les critiques et les sanctions des pays occidentaux, Pékin n'a pas renoncé à remettre Hong Kong au pas. De Londres à Washington, Pékin est accusé de violer les termes de la rétrocession de 1997. Ceux-ci sont censés garantir un fonctionnement démocratique à Hong Kong jusqu'en 2047.
Le projet de loi n'a pas été rendu public, mais d'après un haut responsable du parlement, il consiste à modifier l'élection du Conseil législatif (Legco), le parlement hongkongais. Cet organe compte actuellement 70 députés, dont seuls la moitié sont élus démocratiquement et l'autre moitié désignés par un 'comité électoral' inféodé à Pékin.
Ce dispositif a permis au pouvoir chinois de s'assurer des majorités favorables à Hong Kong depuis la rétrocession du territoire britannique à la Chine en 1997.
Candidats sélectionnés
La réforme en préparation accroîtrait le nombre de députés désignés par le comité électoral, qui se verrait en outre habilité à sélectionner les candidats autorisés à se présenter au scrutin démocratique.
Le comité électoral aura pour tâche 'd'élire une grande partie des membres du Conseil législatif et de participer directement à la nomination de tous les candidats', a déclaré devant la presse Wang Chen, vice-président du Comité permanent de l'ANP.
Seulement des 'patriotes'
A l'approche des élections législatives hongkongaises prévues en principe en septembre, Pékin a déjà fait savoir qu'il entendait faire en sorte que seuls des 'patriotes' puissent diriger la métropole financière de 7 millions d'habitants.
En d'autres termes, la réforme donnerait au pouvoir un droit de veto sur les candidats qui seraient insuffisamment pro régime aux yeux de Pékin. Le dispositif autorisera la cheffe de l'exécutif Carrie Lam et les autorités de Pékin 'à disqualifier tous les éléments pro démocratie', résume Willy Lam.
Eviter un nouvel affront
L'élection des conseillers de district, fin 2019, avait été largement remportée par l'opposition. Pékin semble redouter que l'affront se répète.
Selon la presse locale, les élections législatives, qui auraient déjà dû se tenir l'an dernier, mais ont été reportées pour cause d'épidémie, pourraient à nouveau être repoussées d'un an,
/ATS