Forts de leur victoire aux élections régionales, les indépendantistes catalans devaient relever vendredi le défi de reprendre le pouvoir. Cela alors que leurs dirigeants restent en exil ou en prison et que Madrid maintient son intransigeance.
Depuis Bruxelles où il a pris la fuite pour éviter l'arrestation, le président catalan Carles Puigdemont, destitué mais conforté par les urnes, a proposé au chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy de le rencontrer 'à Bruxelles ou dans n'importe quel autre lieu de l'UE'.
A Madrid, M. Rajoy a repoussé cette offre. 'La personne avec laquelle je devrais m'asseoir, c'est Inès Arrimadas', tête de liste du parti Ciudadanos, qui a remporté le plus de voix et de sièges au parlement catalan, a-t-il dit.
Appel à l'UE
Poursuivi pour 'rébellion et sédition', M. Puigdemont risque toujours d'être arrêté s'il revient au pays. Il a demandé à être entendu par les institutions européennes. 'Je demande à l'UE d'écouter le peuple catalan et pas seulement l'État espagnol', a-t-il déclaré.
Dans son bras de fer avec Madrid, le dirigeant nationaliste cherche systématiquement à se placer sur le même plan que le chef du gouvernement espagnol et à être reconnu par la communauté internationale, sans y parvenir pour l'instant.
Article 155
M. Rajoy a pour sa part également prévenu que le prochain gouvernement catalan, 'quel qu'il soit (...) sera soumis à l'empire de la loi'.
Une façon de sous-entendre qu'il n'hésiterait pas à recourir à nouveau à l'article 155 de la constitution, utilisé le 27 octobre pour destituer le gouvernement catalan et dissoudre le parlement qui venait de déclarer l'indépendance.
Poursuites élargies
M. Puigdemont avait lui affirmé qu'en cas de victoire, il rétablirait le gouvernement destitué. Mais bien que réélu, il ne pourrait exercer ses fonctions depuis une cellule. Au total, parmi les nouveaux députés indépendantistes, 17 sont inculpés, dont trois en prison et cinq en exil.
La Cour suprême espagnole a d'ailleurs élargi vendredi à 6 personnalités indépendantistes supplémentaires (en plus des 22 déjà inculpées) les poursuites engagées pour rébellion, sédition et malversations.
Risque de nouvelles élections
Les indépendantistes disposent à nouveau d'une majorité, mais réduite. Ils pourraient avoir du mal à former un gouvernement.
'Le risque de nouvelles élections reste élevé', estime Antonio Barroso, analyste chez Teneo Intelligence. En effet si aucun gouvernement n'est formé à Barcelone avant fin mars, de nouvelles élections devront être convoquées dans les 2 mois.
Succès spectaculaire pour Ciudadanos
La victoire des indépendantistes, en sièges (70 sur 135, soit 2 de plus que la majorité absolue) mais pas en voix, sera également limitée par le bon résultat du plus résolu des partis opposés à l'indépendance, Ciudadanos, en tête avec 37 députés.
Inès Arrimadas a remporté un succès spectaculaire avec 1,1 million de voix. Son parti formé il y dix ans pour lutter contre le nationalisme catalan sera le plus fort au parlement régional, mais elle n'a pas d'alliés pour former une coalition de gouvernement.
Les socialistes, aussi opposés à l'indépendance, n'ont que 17 sièges et le PP s'est effondré, tombant à 3 sièges contre 11 aux dernières élections en 2015.
/ATS