Un opposant iranien menacé par la Suisse d'expulsion dans son pays, où il risque la prison et 70 coups de fouet, a obtenu gain de cause à Strasbourg. La Cour européenne des droits de l'homme a jugé que son renvoi violerait l'interdiction des traitements inhumains ou dégradants.
Agé d'une trentaine d'années, cet opposant avait demandé l'asile et déclaré avoir participé à des manifestations contre le gouvernement qui avaient été réprimées avec brutalité. Craignant d'être arrêté, il avait fui le pays.
En raison de contradictions dans ses déclarations, l'Office fédéral des migrations (ODM) avait rejeté sa requête et lui avait ordonné de quitter la Suisse. Une décision confirmée par le Tribunal administratif fédéral (TAF).
Expulsé en Iran, le requérant pourrait être exposé à de graves souffrances physiques, qui doivent être considérées comme relevant de la torture au sens de l'art. 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, souligne la cour. D'autant que les conditions dans lesquelles les opposants politiques sont détenus confirment le risque de traitements inhumains ou dégradants.
Contrairement au TAF, la Cour européenne juge que la portée des contradictions des premières dépositions faites devant les autorités suisses doit être relativisée. Elle relève que le requérant a pu ensuite fournir des explications plausibles en indiquant notamment que sa famille avait craint d'envoyer par la poste les originaux de la condamnation.
De plus, la première déposition avait été sommaire alors que l'interrogatoire mené deux ans après avait été plus approfondi.
A une majorité de six voix contre une, la Cour juge que le renvoi du requérant violerait l'interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants. Elle décide par ailleurs que l'intéressé ne doit pas être expulsé avant que son arrêt ne devienne définitif - la Suisse peut encore recourir devant la Grande Chambre - ou qu'une nouvelle décision soit rendue.
La Cour condamne la Suisse à payer au requérant une indemnité de 2415 euros (environ 2900 francs) pour ses frais et dépens.
Dans un contexte différent, la Cour européenne avait rendu au début du mois une décision similaire. Elle avait jugé que l'expulsion sans conditions d'une famille de requérants d'asile afghans de Suisse en Italie, en vertu du système Dublin, violerait l'art. 3 de la Convention européenne des droits de l'homme.