Le Conseil des Etats ne veut pas faire fuir les riches étrangers de Suisse. Au dam de la gauche, il a rejeté jeudi par 30 voix contre 9 et 3 abstentions l'initiative populaire pour l'abolition des forfaits fiscaux. Le Conseil national doit encore se prononcer.
Intitulé "Halte aux privilèges fiscaux des millionnaires", le texte du parti "La Gauche" est soutenu par le camp rose-vert et les syndicats. Pour les initiants, les forfaits fiscaux offerts aux riches étrangers établis en Suisse sans exercer d'activité lucrative constituent un privilège fiscal indu qui doit être supprimé.
L'imposition selon la dépense concerne moins d'un millième des contribuables, mais elle a rapporté 668 millions de recettes fiscales en 2010, a relevé Konrad Graber (PDC/LU). L'initiative diminuerait les recettes fiscales et ferait fuir les contribuables concernés. Quelque 48% des étrangers imposés au forfait ont quitté Zurich lorsque le canton a aboli ce système.
Des mesures ont déjà été prises. Sur proposition conjointe du Conseil fédéral et des cantons, le Parlement a décidé de durcir les conditions d'octroi des forfaits à compter de 2016.
A l'avenir, la dépense minimale prise en compte dans le cadre des impôts cantonal et fédéral s'élèvera à sept fois le loyer ou la valeur locative du logement, au lieu de cinq. Pour les étrangers qui séjournent à l'hôtel, la barre correspondra à trois fois au lieu de deux le prix de la pension pour l'hébergement et la nourriture.
Ce durcissement ne répond pas aux exigences d'équité devant l'impôt sur lequel repose le système fiscal, a critiqué Christian Levrat (PS/FR). Il n'y a pas de raison d'imposer un riche étranger établi en Suisse différemment de son riche voisin suisse et le système n'est pas transparent.
Le camp bourgeois l'a dénié et invoqué le fédéralisme. Selon Raphaël Comte (PLR/NE), il n'y a de toute façon pas d'inégalité fiscale à corriger, au contraire. Les étrangers domiciliés en Suisse réalisent leurs revenus à l'étranger et sont imposés à la source. Les forfaits visent à éviter une double imposition.