L'initiative populaire qui prévoit un impôt sur les successions menace les PME et ne résout pas les problèmes structurels de l'AVS. A l'instar du Conseil des Etats, le National a décidé par 124 voix contre 56 de recommander le rejet du texte du parti évangélique et de la gauche.
Le texte "Imposer les successions de plusieurs millions pour financer notre AVS (Réforme de la fiscalité successorale)" veut taxer à hauteur de 20% la part des héritages dès deux millions de francs, ainsi que les dons de plus de 20'000 francs.
Le texte propose que les recettes, estimées à trois milliards de francs par an, aillent pour deux tiers à l'AVS et pour un tiers aux cantons, qui n'imposeraient plus les successions et donations. Des exemptions et des allègements sont prévus pour la transmission d'entreprises familiales. Les exploitations agricoles seraient totalement libérées de la taxe.
Vouloir soutenir l'AVS avec deux milliards, c'est "un emplâtre sur une jambe de bois", au vu du besoin structurel de l'assurance de huit milliards, a lancé Dominique de Buman (PDC/FR). En aucun cas un impôt sur les successions ne permet d'améliorer de manière durable la situation.
Les inégalités de traitement induites par le texte ont aussi été critiquées. Aucun impôt ne serait par exemple perçu sur un legs de 1,99 million destiné à un seul héritier, tandis que des impôts seraient prélevés sur un montant de 2,1 millions attribués à trois héritiers, a illustré Christophe Darbellay (PDC/VS).
Le texte porte gravement atteinte à la souveraineté fiscale des cantons, ont averti divers orateurs. A l'exception de Schwyz, et contrairement à la Confédération, tous les cantons connaissent un impôt sur les successions. Il ne frappe toutefois jamais le conjoint.
Seuls Vaud, Neuchâtel et Appenzell Rhodes-Intérieures taxent les descendants directs, mais uniquement à des taux en dessous de 5%. En revanche, les autres héritiers sont aujourd'hui imposés à des taux nettement supérieurs aux 20% prévus.
L'application rétroactive de l'initiative au 1er janvier 2012 n'a guère été goûtée non plus: un poison pour la stabilité économique.
Hansruedi Wandfluh (UDC/BE) a affirmé n'avoir jamais vu une initiative aussi nuisible et "digne d'un Etat voyou". Elle s'attaque à la charpente de l'économie helvétique, à savoir les PME. Pour Jean-René Germanier (PLR/VS), c'est un impôt "qui favorise les cigales héritières au détriment des fourmis 'épargnères'".
Par ailleurs, les recettes escomptées sont loin d'être assurées, aux yeux de la ministre des finances Eveline Widmer-Schlumpf. Au gré des exceptions promises, les cantons pourraient y perdre.
Seule la gauche a pris la défense de l'initiative. Elle y voit un bon moyen de lutter contre la concentration de la fortune - 59% de la fortune est aux mains de 1% de la population - et contre les inégalités de traitement entre cantons.