La Suisse doit rétablir des contingents pour tous les étrangers à partir de quatre mois de séjour. Le Conseil fédéral a opté pour une application stricte de l'initiative sur l'immigration acceptée le 9 février par le peuple. Le conflit avec Bruxelles est programmé. L'UDC n'en est pas moins en colère.
Berne va officiellement demander l'adaptation de l'accord sur la libre circulation des personnes. Le Conseil fédéral sait que la partie sera très difficile, a dit Simonetta Sommaruga. "On peut tourner le problème dans tous les sens, le nouvel article n'est pas compatible avec l'accord de libre circulation", a estimé la ministre de la justice, tout en jugeant "évident" que la constitution doit s'appliquer.
Le gouvernement va mener le processus législatif interne et le processus avec l'Europe de manière parallèle. Mme Sommaruga s'est refusée à toute spéculation sur ce qui pourrait se passer siBruxelles dénonce l'accord de libre circulation et sonne le glas des autres accords bilatéraux. Didier Burkhalter avait récemment estimé que le peuple pourrait devoir voter pour choisir entre dénoncer la voie bilatérale ou revoir la constitution.
Comme les initiants, le Conseil fédéral renonce à arrêter un objectif précis de diminution de l'immigration. Il veut lui aussi pouvoir réagir aux besoins de l'économie et à la conjoncture.
Les propositions gouvernementales ont des similitudes avec celles de l'UDC, mais s'en écartent sur plusieurs points. Pas question de réintroduire un statut de saisonnier. "Il ne faut pas répéter les erreurs du passé", a expliqué Mme Sommaruga. Même les personnes séjournant brièvement en Suisse pourront faire venir leur famille.
Le Conseil fédéral se garde aussi les mains libres pour l'asile. Pour toutes les autres catégories de personnes, les autorisations seront limitées dès un séjour d'au moins quatre mois. Les frontaliers n'échapperont pas non plus aux quotas.
Le Conseil fédéral fixera et attribuera les contingents aux cantons une fois par an. Les cantons pourront annoncer leurs besoins au gouvernement. Ce sera aussi à eux de ventiler leur contingent global. La préférence nationale devra toujours être prise en considération.
Mais rien n'est joué. L'UDC n'est pas contente, elle juge le projet inacceptable. "Ce n'est pas avec des contingents élevés qu'on peut réduire massivement l'immigration", a réagi Christoph Blocher. Le parti continuera de travailler à son projet d'initiative de mise en oeuvre.
Pour le PDC et le PLR, le gouvernement est cohérent avec la volonté du peuple. La gauche redoute quant à elle une politique discriminatoire et des baisses de salaires.
Une application stricte de l'initiative sur l'immigration de masse ne plaît ni à l'Union patronale suisse ni à economiesuisse. Les autres organisations économiques réagissent avec pragmatisme.
La Commission européenne a pris connaissance du concept général présenté par le Conseil fédéral, qui confirme ses craintes. Avant de livrer une réponse officielle, la Commission va étudier la question d'une renégociation ainsi que le projet de loi que le Conseil fédéral veut présenter à la fin de l'année.