Arafat: les experts suisses évoquent un empoisonnement au polonium

Les experts suisses qui ont investigué sur le décès de Yasser Arafat penchent pour un empoisonnement au polonium, mais sans être toutefois totalement affirmatifs. Les résultats obtenus sont "plus cohérents" avec ce scénario qu'avec l'hypothèse inverse, estiment-ils.

"Nos résultats peuvent soutenir raisonnablement que la mort a été la conséquence d'un empoisonnement au polonium-210", a déclaré jeudi le professeur Patrice Mangin, directeur du Centre universitaire romand de médecine légale (CURML).

M. Mangin et le professeur François Bochud, directeur de l'Institut de radiophysique appliquée, ont expliqué la méthode utilisée pour analyser les prélèvements effectués fin 2012 sur la dépouille du leader palestinien. Leurs conclusions sont nuancées et prudentes, même si les scientifiques se disent "confiants dans leurs résultats".

Les spécialistes ont rappelé qu'ils avaient mené une expertise médico-légale complète. Ils ont eu à disposition le dossier médical de Yasser Arafat lors de son hospitalisation en France et ont procédé à diverses analyses toxicologiques et radiologiques de ses effets personnels, puis à partir de prélèvements sur sa dépouille.

Longs délais

Mais plusieurs éléments ont rendu leurs investigations "difficiles", ont insisté les chercheurs: d'abord, les échantillons biologiques recueillis lors de l'hospitalisation ont été détruits. Ensuite, les huit ans écoulés entre le décès du Palestinien en 2004 et son exhumation fin 2012. "Ce délai est très long. Une substance comme le polonium a pu décroître fortement", a dit M. Mangin.

Ces analyses détaillées ne permettent pas d'exclure le polonium comme source du décès ni de dire "avec certitude" que cette substance radioactive hautement toxique a provoqué le décès du leader palestinien.

Hypothèse la plus cohérente

Confrontant leurs données aux deux scénarios possibles, les experts ont jugé que l'hypothèse "la plus cohérente" était celle d'un empoisonnement au polonium, a expliqué Patrice Mangin. Sur une échelle à plusieurs niveaux ("slightly, moderately et strongly"), ils retiennent le terme "moderately", soit l'hypothèse "la plus raisonnable", selon les propos de M. Mangin.

Ces experts affirment que les doses de polonium détectées impliquent l'intervention d'un tiers. Il n'est pas possible d'ingérer du polonium par erreur ou par accident.

Trois équipes - suisse, russe et française - ont été chargées d'analyser les prélèvements effectués sur le corps de Yasser Arafat. Les résultats de deux autres équipes ne sont pas encore connus.

L'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon avait donné l'ordre de ne pas tuer Yasser Arafat, a affirmé jeudi un ex-conseiller du Premier ministre israélien, Raanan Gissin, qui était également alors porte-parole de l'ancien chef du gouvernement.

Un porte-parole du Fatah, le mouvement du président palestinien Mahmoud Abbas, a lui indiqué que "les résultats du rapport d'analyse sur la dépouille de Yasser Arafat" ont montré que l'ancien raïs "avait été empoisonné au polonium". "Ce qui signifie que le crime a été commis par un Etat", condamne Abou Youssef.

M. Youssef a appelé à la constitution d'une "commission d'enquête internationale sur le meurtre du président Arafat".

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