La quasi-totalité des produits helvétiques pourra être exportée vers l'Indonésie sans entraves douanières. Les Suisses ont accepté dimanche à 51,66% l'accord de partenariat économique avec Jakarta. Ce résultat pourrait influencer les prochains accords de la Suisse.
Défendu par le Conseil fédéral, l'accord était soutenu par une large coalition des partis de droite et du centre, ainsi que les milieux économiques. Les Verts et le PS s'y étaient opposés.
Les milieux économiques attendaient un 'oui clair et net' et ont été surpris par ce résultat serré, malgré un large soutien. Ca fait réfléchir, a admis le conseiller national Fabio Regazzi (Centre/TI), membre du comité pour le oui à l'accord avec l'Indonésie.
Vote 'historique'
Environ 1,408 million de Suisses ont glissé un 'oui' dans l'urne contre quelque 1,317 million de 'non' au traité conclu par l’Association européenne de libre-échange (AELE) en 2018. Le Valais est l'unique canton francophone à l'accepter, à 51,8%.
Nidwald et Zoug, avec plus de 60%, se sont montrés les plus grands partisans de l'accord. Les Vaudois se sont révélés les plus farouches adversaires du texte. Ils le rejettent par 65,8% des voix, suivis des Jurassiens (64,7%), des Neuchâtelois (60,5%), des Genevois (59,7%) et des Fribourgeois (53,7%). Outre-Sarine, faisant cavalier seul, Bâle-Ville refuse l'accord à 51,2%.
'Ce vote a quand même un certain côté historique', a estimé le ministre de l'économie Guy Parmelin. Pour la première fois des règles de durabilité sont inscrites dans un accord et seront appliquées et contrôlées.
Ce vote confirme la politique de soutien aux entreprises sur les marchés internationaux, a affirmé le conseiller fédéral. Il a dit toutefois comprendre les préoccupations des opposants et celles-ci seront prises en compte dans la mise en oeuvre de l'accord.
Accord 'équilibré'
Il faudra à l'avenir 'faire plus attention et être plus sensible' aux questions environnementales et de conditions de travail, a indiqué M. Regazzi. Il a par ailleurs regretté que la campagne se soit focalisée sur la question de l'huile de palme, qui ne représente qu'une très petite partie de l'accord.
Cette question ne reviendra pas 'forcément sur les accords avec les autres Etats', a estimé Fanny Noghero, secrétaire générale du PLR. L'accord avec l'Indonésie est 'équilibré et pense développement durable aussi', ce qui est très positif, selon elle.
Pour les Verts, ce résultat montre que 'la durabilité est de plus en plus importante dans les accords commerciaux'. 'On avait déjà gagné avant les résultats puisqu'on a ouvert le débat', a indiqué l'initiateur du référendum Willy Cretegny.
Marché prometteur
Avec ses 271 millions d'habitants, l'Indonésie connaît une croissance fulgurante et devrait figurer parmi les quatre plus grandes économies mondiales en 2050. L'accord permet aux entreprises suisses d'accéder sans obstacle ou presque à un marché en pleine croissance. Il fait tomber les droits de douane pour toutes les principales exportations suisses vers l'Indonésie.
En contre-partie, les entreprises indonésiennes pourront exporter des produits industriels vers la Suisse en franchise douanière. L'accord ne concerne en revanche pas les produits agricoles. Seule une réduction partielle des droits de douane est envisagée pour les importations indonésiennes.
Au vu des fortes réticences tant des milieux environnementaux que des milieux agricoles, le Conseil fédéral a fait des concessions et prévu des contingents sur les importations d'huile de palme bénéficiant d'une réduction des droits de douane. La baisse atteindra 20 à 40%. Seule l'huile produite de manière durable profitera de l'accord. L'ordonnance d'application, actuellement en consultation, contient également des garde-fous.
Autres référendums en vue
Les référendaires ont mis en avant les dommages provoqués par l'huile de palme sur l’écosystème indonésien. Ils voulaient aussi dénoncer le principe même du libre-échange. Ils ont déjà averti qu'ils combattront les autres traités de ce type que le Conseil fédéral négocie actuellement.
Les Verts mettront tout en œuvre pour que 'l’accord avec le Mercosur comporte des dispositions contraignantes et applicables pour protéger la population, le monde animal et l’environnement'. Sans des critères suffisants, le Parti socialiste s'y opposerait également, a indiqué sa vice-président Barbara Gysi.
L'UDC laisse aussi planer le doute sur son soutien à de futurs accords de libre-échange. Sans garde-fous comme ceux qui existent dans l'accord avec l'Indonésie, l'UDC ne soutiendra pas forcément d'autres accords, a prévenu la conseillère nationale Céline Amaudruz (UDC/GE).
L’AELE a signé l'accord avec l'Indonésie en 2018 au terme de huit années de négociations, devançant ainsi les Etats-Unis et l'UE. Grâce au 'oui' du peuple, l'accord pourra entrer en vigueur trois mois après la ratification du texte par le dernier contractant.
/ATS