Surendettée, la société des remontées mécaniques de Charmey dépose le bilan. Le dénouement met un point final à un long feuilleton touchant à l'avenir des activités hivernales de la station des Préalpes fribourgeoises.
L'ambiance était empreinte d'émotion vendredi lors de la conférence de presse tenue à la Forge de la Tzintre. 'C'était un secret de Polichinelle depuis l'arrêt des installations dimanche dernier', a admis Patrice Borcard, préfet de la Gruyère et président de la task force formée en novembre dernier en vue d'un sauvetage.
Le coup de grâce est venu le 11 février avec le dépôt d'un recours par quatre citoyens de la commune de Val-de-Charmey. Ils se sont ainsi élevés contre l'assemblée communale, qui avait décidé d'octroyer une aide de 250'000 francs à la Société Télécabine Charmey-Les Dents-Vertes en Gruyère (TCDV) le 14 janvier. Cette procédure prendra des mois.
Ne pas stigmatiser
Ces citoyens, que les autorités ne veulent pas nécessairement stigmatiser, estiment que les participants à l'assemblée communale détenant des actions de la société exploitante auraient dû se récuser. Le blocage de l'argent explique l'arrêt prématuré des installations après les vacances de carnaval.
A court de liquidités et sans possibilités d'assainissement, la société exploitante a avisé lundi le juge de la situation de surendettement, a indiqué l'avocat Claude Gremion. Le dénouement a mis fin au travail de la task force, qui a accompli un gros travail pour évaluer des pistes à même de sortir de l'ornière.
La cessation d'activité laisse sur le carreau neuf employés fixes, représentant huit postes à temps complet, a expliqué Etienne Genoud, président du conseil d'administration de la société exploitante et vice-syndic de Val-de-Charmey. Ils seront licenciés, mais pourront être replacés en partie dans d'autres domaines skiables de la région.
Plutôt une bonne saison
Les effectifs comprenaient un total de 40 personnes en hiver et de 15 en été, les postes fixes étant complétés par des intérimaires. 'Ces derniers ont été payés', a dit Etienne Genoud, qui a regretté cette issue alors que la saison hivernale s'est révélée plutôt favorable avec une perte opérationnelle réduite.
'Il n'en demeure pas moins que les installations souffrent d'un déficit structurel', a admis Yves Page, le syndic de Val-de-Charmey, dont c'était vendredi le dernier jour dans la fonction. TCDV exploite notamment une télécabine, qui mène au domaine skiable, et un télésiège, dont les coûts d'exploitation ont grimpé au fil des ans.
De plus, l'évolution climatique a réduit de moitié le nombre de jours d'ouverture en hiver. 'Nous sommes passés de 95 à 100 jours en moyenne dans les années 1960 à moins de 50 jours ces dernières années', a noté Yves Page. Selon lui, 'la faillite est cruelle, mais constitue une étape dans l'évolution du modèle touristique de Charmey'.
Inventer un avenir
'Il s'agit d'inventer un avenir', a résumé Patrice Borcard. Les installations resteront fermées cet été. La télécabine Rapido Sky et le télésiège n'appartiennent pas à la société TCDV et ne font pas partie de la faillite. Ces deux infrastructures, pour qui un repreneur est recherché, sont la copropriété de l'Association régionale la Gruyère et de l'Etat de Fribourg.
Le début du feuilleton de ces derniers mois remonte au 19 novembre, jour à l'assemblée communale de Val-de-Charmey a refusé une hausse d'impôts pour maintenir l'aide de 600'000 francs à la société TCDV. La task force a été constituée dans la foulée et les remontées mécaniques ont démarré tout de même la saison le 1er décembre.
Pas plus tard que lundi, divers organismes ont présenté un rapport sur l'avenir des remontées mécaniques fribourgeoises prônant la nécessité d'un soutien public à l'investissement. Le document, appelé 'Préalpes Vision 2030', rappelle que le secteur génère 52 millions de francs de retombées économiques par an dans le canton.
/ATS