A l'heure où les premières asperges blanches du Valais sont sur les étals, les producteurs naviguent à vue. Le coronavirus les prive d'une partie de leur main-d'oeuvre et de leurs clients.
La saison des asperges a débuté et durera jusqu'à la mi-juin. Les amateurs dégusteront d'abord les blanches, dont le Valais est le premier producteur en Suisse, a indiqué à Keystone-ATS Olivier Borgeat, secrétaire général de l'Interprofession des fruits et légumes du Valais (IFELV). Les vertes seront disponibles dans deux semaines environ.
Selon un sondage mené auprès des producteurs, la filière fruits et légumes valaisanne a besoin pour tourner de quelque 1600 ouvriers, qui viennent essentiellement de Pologne, de la République tchèque ou du Portugal. Pour l'heure, on estime disposer de 30% environ de la main-d'oeuvre nécessaire, précise Olivier Borgeat.
Le gros manque de personnel s'explique par la fermeture des frontières imposée par les gouvernements en raison de l'épidémie de Covid-19. Mais aussi par la défection d'ouvriers craignant pour leur santé ou celle de leur famille.
Milieu pragmatique
Pour la récolte des asperges, Max Spycher, producteur de fruits et légumes à Saillon, dispose pour l'heure de six ouvriers alors qu'il lui en faudrait neuf. Si la récolte et la vente durant le mois d'avril ne lui inspirent guère de crainte, il est en revanche plus inquiet pour les semaines à venir, lorsque les volumes seront plus importants, passant de 150 à 400 kilos d'asperges par jour environ.
Sans parler de la cueillette des fraises par exemple, qui nécessitera en mai une trentaine d'ouvriers environ. Mais l'affolement n'est pas de rigueur: 'Le milieu agricole est très pragmatique. Des solutions sont en train de se mettre en place', note, confiant, Olivier Borgeat.
Parmi elles, la possibilité d'employer une main-d'oeuvre locale venue d'autres branches au chômage en raison de la crise sanitaire. Pour assurer l'interface, l'Union suisse de paysans (USP) a par exemple mis en place la plate-forme d'embauche agrix.ch.
Restaurants fermés
Au souci de main-d'oeuvre s'ajoute celui de l'écoulement des produits. Les asperges se vendent à 60% via la vente directe (y compris aux restaurateurs) et à 40% par le commerce de détail, avec deux pics importants, Pâques et la fête des mères.
Les restaurants étant fermés, l'objectif est de compenser la perte en augmentant les ventes dans les magasins. Il s'agit aussi et surtout d'encourager les particuliers qui dégustaient les asperges dans les établissements publics à jouer le jeu en se tournant vers les commerces ou la vente directe.
La livraison à domicile est aussi une alternative, déjà mise en place par certains bien avant la crise du coronarivus. Pour Max Spycher, qui gère au total 24 hectares de surface agricole, cette solution est très diffcile à envisager en cette période de pénurie de personnel et à cause des règles sanitaires à respecter.
Pas de vision globale
La trentaine de producteurs d'asperges valaisans doivent comme tout le monde prendre des précautions sanitaires particulières. 'Mon épouse et moi-même sommes les seuls à s'occuper de la vente directe pour ne pas exposer nos ouvriers et nous travaillons par équipe réduite afin de garantir la distance sociale', détaille Max Spycher.
Les producteurs de fruits et légumes avancent pas à pas, au rythme des décisons des gouvernements. 'Nous n'avons pas de vision globale, c'est compliqué', note Olivier Borgeat. A tout cela s'ajoutent une pression et un stress supplémentaires: le risque de gel dans les vergers pendant la nuit.
/ATS