Les personnes qui signalent des irrégularités sur leur lieu de travail doivent être mieux protégées. Contrairement au National, le Conseil des Etats a soutenu lundi par 26 voix contre 16 le projet du gouvernement sur les lanceurs d'alerte.
Le droit du travail doit préciser les conditions auxquelles les travailleurs peuvent signaler des problèmes, ont estimé les sénateurs. Le cas des lanceurs d'alerte ne sont pas réglés dans le droit, a rappelé la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter.
Ils sont souvent défavorisés lorsqu'ils dénoncent des problèmes en interne et s'exposent même à des sanctions pénales. Et Daniel Jositsch (PS/ZH) de souligner que cette situation a été critiquée également par l'OCDE selon laquelle le cadre juridique est insuffisant. 'Nous sommes donc contraints d'agir.'
La solution en cascade proposée par le Conseil fédéral est appropriée, proportionnée et elle ne peut être davantage simplifiée, a fait valoir Beat Rieder (PDC/VS) qui a appelé à ne pas couler le dossier. 'C'est le seul projet convenable.' Et Mme Keller-Sutter d'ajouter qu'un meilleur projet ne pourra pas être présenté.
Le texte est 'un progrès par rapport à la situation actuelle'. Il offre une voie pour les whistleblowers, a souligné M Jositsch.
De l'employeur
Avec la nouvelle mouture, les grands axes du projet restent inchangés. Une structure en cascade est prévue. Un signalement ne sera en principe admis que si l'employé se tourne d'abord vers l'employeur et lorsque le soupçon est raisonnable.
L'entreprise a ainsi la possibilité de remédier elle-même aux irrégularités dans un délai de 90 jours et de mettre sur pied un service pour recevoir et traiter les signalements, a précisé M. Jositsch.
Les dénonciations anonymes seront possibles. Dans la pratique, cette première étape est souvent la dernière, selon Mme Keller-Sutter.
Au public
Si l'employeur n'a pas pris les mesures requises, que l'employé a subi des désavantages, que son contrat de travail a été résilié ou que le signalement n'aurait aucun effet, le lanceur d'alertes peut s'adresser à une autorité. Mais uniquement sous certaines conditions.
Notamment un danger pour la vie de personnes ou de l'environnement. Cette possibilité ne sera pas accordée au travailleur s'il risque d'être licencié ou de subir d’autres désavantages en cas de signalement à l’employeur. Paul Rechsteiner (PS/SG) aurait voulu ajouter cette condition refusée par 29 voix contre 11. Elle aurait permis de contourner la première étape, a expliqué Beat Rieder.
En dernier recours, le travailleur peut s'adresser au public. Des dénonciations anonymes seraient là aussi possibles.
Licenciements abusifs
Le projet ne prévoit toujours pas non plus de renforcer la protection des collaborateurs licenciés abusivement après avoir donné une alerte licite. Au grand regret de M. Rechsteiner et de la gauche qui auraient souhaité que les résiliations abusives soient déclarées nulles.
Les concernés continueront de toucher une indemnité équivalant à six mois de salaire au plus. Le Conseil fédéral est conscient que la protection n'est pas absolue, mais il est convaincu qu'elle n'est pas appropriée, a conclu Mme Keller-Sutter.
Les irrégularités pouvant être signalées seront aussi variées qu'une corruption ou une fraude alimentaire en passant par le mobbing. La violation d’un contrat conclu avec un client ou un dommage qui lui est causé par l’organisation ne pourront en revanche pas être signalés car le projet exclut, en principe, le droit privé.
Serpent de mer
L'amélioration de la protection des lanceurs d'alerte est un serpent de mer. Un premier projet mis en consultation en décembre 2008 sur la base d'une motion, datant de 2003, n'avait guère convaincu. Les patrons et l'UDC l'avaient estimé superflu, la gauche et les syndicats voulaient aller plus loin et prévoir la réintégration de la personne congédiée abusivement.
Le Parlement et le Conseil fédéral veulent ancrer dans la loi ce qui est licite. Mais les Chambres avaient jugé les premières propositions du gouvernement trop compliquées et lui avait renvoyé le dossier en 2015. Pour l'instant, c'est le tribunal qui détermine au cas pour cas si un signalement est admissible au non.
Le dossier retourne au National.
/ATS