L'initiative 'Pour une eau potable propre et une alimentation saine', qui veut couper les paiements directs aux agriculteurs recourant aux pesticides ou aux antibiotiques, a été déposée jeudi à la Chancellerie fédérale. Elle a recueilli 114'420 signatures.
Elles ont été rassemblées en environ dix mois, ont indiqué les initiants. Le texte prévoit que la Confédération veille à ce que l'agriculture contribue à la sécurité de l'approvisionnement de la population en denrées alimentaires saines et en eau potable propre.
Les paiements directs seraient soumis à la condition de respecter des exigences écologiques comme la préservation de la biodiversité, une production sans pesticides et des effectifs d'animaux pouvant être nourris avec le fourrage produit dans l'exploitation.
Ces subventions seraient coupées aux paysans administrant des antibiotiques à titre prophylactique aux animaux qu'ils détiennent ou dont le système de production requiert l'administration régulière d'antibiotiques. L'octroi d'autres aides (recherche, formation, investissement) dépendrait des mêmes conditions.
Cette initiative est impérative, insistent les initiants. Car l'utilisation intensive de pesticides et d'antibiotiques en agriculture contamine nos eaux et nos eaux souterraines, détruit la biodiversité, pollue les sols et favorise le développement de bactéries résistantes aux antibiotiques.
Milliards investis, objectifs pas atteints
Depuis 1996, la Confédération a investi chaque année des milliards de francs pour les prestations écologiques. Leur objectif est de favoriser une agriculture produisant des denrées alimentaires naturelles et écologiques, dans le respect du bien-être des animaux de rente. Le peuple fait confiance aux autorités pour que l'argent soit investi dans ce but.
Mais la réalité est bien différente, estiment les initiants: près de trois stations de surveillance des eaux souterraines sur quatre, dans les zones agricoles intensivement cultivées du Plateau, présentent des concentrations de résidus de pesticides supérieures aux valeurs prescrites par la loi.
Plus grave encore: la quantité de pesticides dans nos eaux de surface. Des recherches font état de dizaines de substances actives de pesticides dans de nombreuses étendues d'eau, ce qui enfreint la législation sur le contrôle de la pollution de l'eau. L'agriculture en est en grande partie la responsable.
Les initiants dénoncent aussi l'élevage intensif, qui génère de l'ammoniac, toxique pour l'environnement. Il entraîne une sur-fertilisation des plans d'eau, des tourbières et forêts et altère aussi la santé de nos poumons.
Quant aux antibiotiques, ils continuent d'être utilisés en prévention dans les élevages en Suisse. Or, les bactéries résistantes aux antibiotiques figurent parmi les plus grandes menaces pour la santé de la population suisse.
Paysans critiques
L'initiative 'Pour une eau potable propre et une alimentation saine - Pas de subventions pour l'utilisation de pesticides et l'utilisation d'antibiotiques à titre prophylactique' n'est pas du goût de l'Union suisse des paysans (USP). La faîtière s'engage aussi pour que moins de pesticides soient utilisés dans l'agriculture, mais est contre un renoncement total.
Car sans mesures phytosanitaires, les rendements vont baisser de 20 à 40%, indiquait-elle en juin dernier. Et l'industrie alimentaire suisse a besoin d'un approvisionnement sûr et continu en matières premières. Sans compter que même 'la production biologique ne peut se passer des produits phytosanitaires', selon le président de l'USP Markus Ritter.
L'initiative peut cependant compter sur le soutien de plusieurs organisations environnementalistes, de protection de la nature et de protection des animaux. Parmi elles, Greenpeace Suisse, BirdLife Suisse, la Fédération suisse de pêche, l'association 'Tier-im-Fokus' et Swissveg.
/ATS