La raffinerie de Cressier (NE), la dernière encore active en Suisse, fournit toujours le quart des produits raffinés du pays, malgré la fermeture de Collombey-Muraz (VS). Consciente de devoir évoluer, elle se dirige vers des produits de plus en plus écologiques.
Sorte de paquebot échoué entre les lacs de Neuchâtel et de Bienne, la raffinerie de Cressier, mise en service en 1966, fascine autant par son architecture avec ses grandes cuves, sa cheminée de 105 mètres de haut, les flammes qui sortent de sa torchère et sa plus grande gare ferroviaire privée de Suisse, qu'elle irrite avec les odeurs et le bruit qui peuvent incommoder les habitants des villages voisins.
Pourtant, quand elle s'est arrêtée en janvier 2012 en raison de la faillite de Petroplus, la région est traumatisée. Grâce à la reprise par le groupe Varo Energy Holding, basé à Zoug, elle peut toutefois redémarrer en juillet de la même année avec ses 270 employés - 280 collaborateurs actuellement.
Stocks stratégiques
Il faut dire que la raffinerie joue un grand rôle dans l'acheminement en produits pétroliers du pays. 'Quand le Rhin était à sec et que les bateaux ne pouvaient plus livrer le pays par ce biais, la Suisse a dû recourir à ses stocks stratégiques', déclare à Keystone-ATS Reinout Houttuin, directeur de la raffinerie.
Selon lui, l'importation de pétrole par oléoduc est le moyen 'le plus sûr, le moins coûteux et le plus facile'. Cressier s'approvisionne par celui qui part de Fos-sur-mer, vers Marseille, jusqu'à Karlsruhe. Varo possède la branche du pipeline qui va de Besançon à Cressier, via notamment la Vue-des-Alpes, et qui est en train d'être rénové.
'Actuellement, la raffinerie est quasi à sa pleine capacité. On ne peut l'augmenter que de 10% maximum. S'il y a des surcapacités en Europe, ce n'est pas le cas en Suisse, ajoute Reinout Houttuin. On est en concurrence au niveau européen et on n'a pas vu de différence de prix et de variation de la demande avec la fermeture de Collombey-Muraz'.
Echangeurs de chaleur
Le directeur observe que la raffinerie reste 'très efficace', malgré les salaires élevés en Suisse. L'entreprise est notamment très performante dans la récupération de chaleur, grâce aux échangeurs qu'elle a mis en place.
'Cela permet de ne pas utiliser nos fours à gaz à fond', note Reinout Houttuin. La récupération de chaleur permet également de chauffer à distance les locaux de l'entreprise et un projet existe pour une extension vers le village voisin de Cornaux.
La raffinerie a aussi choisi de travailler avec un pétrole brut léger, qui vient à 57% d'Afrique. Avec l'évolution des réglementations en lien avec les émissions de CO2, la firme a été l'une des pionnières en Suisse en 2014 à mélanger du bioéthanol, qui représente actuellement 15% de ses produits. Elle propose aussi du diesel B7, qui contient 7% de composante bio.
De plus, 'd'ici à 2020, les carburants marins devront avoir une teneur en soufre de 0,5%, contre 3,5% actuellement. Un objectif que nous avons déjà quasi atteint', note le directeur.
Investissements
Si la raffinerie a investi 50 millions de francs en 2015, notamment pour une salle de contrôle, qui permet de surveiller le processus de raffinage et d'agir à distance, elle a continué à investir depuis des dizaines de millions.
'Toutefois, le choix des investissements futurs reste difficile car les décisions politiques en matière climatique ne sont pas claires', relève Reinout Houttuin. Ce dernier reste convaincu que l'on ne pourra pas se passer du raffinage du pétrole avant 30 ans au moins, car il n'y a pas assez d'autres alternatives et parce que les taxes sur les carburants rapportent aussi des milliards chaque année.
En attendant, le directeur estime que la demande en bio-essence va augmenter et Varo prévoit de continuer à jouer un rôle important dans le domaine des biocarburants.
/ATS