Le Conseil des Etats a rejeté lundi, par 28 voix contre 15, la création d'un fonds pour la sécurité de la Suisse et la paix en Europe. Par ce biais, l'armée aurait dû recevoir 10 milliards de plus jusqu'en 2030 et l'Ukraine 5, comptabilisés à titre extraordinaire.
La motion avait été déposée par la commission de sécurité du Conseil des Etats. Elle demandait de créer un fonds temporaire permettant de financer l'ensemble des besoins financiers supplémentaires de l'armée dès 2025 de 10,1 milliards de francs jusqu'en 2030, ainsi que la contribution suisse de 5 milliards de francs pour le soutien à la reconstruction et la remise en état des infrastructures en Ukraine. Le fonds aurait été autorisé à s'endetter temporairement.
Cette solution devait permettre d'une part de renforcer les capacités de défense de l'armée pour faire face à la menace de la guerre. D'autre part, elle aurait apporté un soutien à l'Ukraine qui a besoin d'aide maintenant pour réparer et maintenir ses infrastructures essentielles, a expliqué Marianne Binder-Keller (C/AG) pour la commission. Et d'ajouter que la guerre est une circonstance extraordinaire, qui permet de contourner le frein à l’endettement.
'Situation extraordinaire, réponse extraordinaire'
Un avis que ne partage pas la majorité du Conseil des Etats. Les dépenses de l'armée et celles pour l'Ukraine sont planifiables, elles ne peuvent donc pas être traitées comme des dépenses extraordinaires, a insisté Josef Dittli (PLR/UR). Le texte ne respecte en outre pas l'unité de matière. Cela créerait un dangereux précédent. Il faut être prudent avec le frein à l'endettement, a ajouté Jakob Stark (UDC/TG).
Qu'est-ce qui est extraordinaire, si ce n'est une guerre en Europe? a opposé Andrea Gmür-Schönenberger (C/LU). 'C'est un combat pour la liberté et nos valeurs qui se joue en Ukraine', a ajouté son collègue Charles Juillard (C/JU), qui conclut qu'à 'situation extraordinaire, réponse extraordinaire'.
Conseil fédéral opposé
La motion avait été déposée grâce à une alliance de centre-gauche, mais elle n'a pas fait l'unanimité au sein des élus du Centre et du PS. Le texte ne dit rien sur la manière dont l'argent doit être amorti, a regretté Baptiste Hurni (PS/NE). Et de se demander si les 10 milliards seront compensés dans le budget de l'armée et la somme pour l'Ukraine au détriment de l'aide au développement.
Le Conseil fédéral était aussi opposé au texte. Le gouvernement estime aussi que les capacités de défense de l'armée doivent être rapidement augmentées. Elles devront atteindre 1% du PIB en 2035, a rappelé la ministre de la défense Viola Amherd. Une augmentation plus rapide des dépenses de l'armée dans le respect du frein à l'endettement n'est pas possible et les conditions ne sont pas remplies pour des dépenses extraordinaires, a-t-elle souligné.
/ATS