Le Tribunal fédéral (TF) annule l'interdiction générale d'utilisation de la grève imposée au personnel de soins dans le canton de Fribourg. Le Syndicat des services publics (SSP), qui avait introduit un recours, fait part de sa grande satisfaction.
'L'interdiction restreint de manière disproportionnée le droit de grève, tel qu'il est garanti dans la Constitution fédérale', écrit le TF dans un arrêt publié mercredi. Surtout que cette interdiction ne se limite pas au personnel de soins, dont la présence revêt une dimension indispensable au suivi des patients.
Pour rappel, le cas remonte au 17 novembre 2017, jour où une majorité de députés du Grand Conseil fribourgeois votait une interdiction du droit de grève au 'personnel de soins' dans le canton. La modification de la loi cantonale sur le personnel de l'Etat (LPers) incluait les policiers et les agents de détention.
Effet suspensif
Le 13 juillet, le TF avait accordé l'effet suspensif au recours. Suite à ce dernier, le Conseil d'Etat fribourgeois avait décidé de décaler l'entrée en vigueur de la modification de la loi concernant le droit de grève. Outre le SSP - région Fribourg, deux infirmières de l'Hôpital fribourgeois (HFR) ont aussi attaqué la disposition.
Dans le détail, les juges de Mon Repos admettent le recours et annulent l'article 68 alinéa 7 de la loi sur le personnel, dans la mesure où il interdit le droit de grève au personnel de soins. L'article 28 de la Constitution fédérale définit en effet les conditions dans lesquelles les grèves sont autorisées.
Cet article stipule aussi que la loi peut interdire le recours à la grève à certaines catégories. Le caractère disproportionné de la décision du Grand Conseil se trouve dans le fait que l'interdiction générale 'frappe de manière indifférenciée' l'ensemble des employés soumis à la loi sur le personnel des établissements de soins du canton de Fribourg.
Beaucoup trop large
Selon le TF, la mesure n'introduit aucune distinction en fonction de la nature des activités et 'ne se limite pas au personnel de soins dont la présence serait indispensable à la préservation de la vie et de la santé des patients'. De plus, la loi fribourgeoise soumet déjà le recours à la grève à des conditions strictes.
Des dispositions prévoient en outre la possibilité de restreindre le droit de grève dans des situations exceptionnelles, en particulier pour sauvegarder la sécurité et l'ordre publics ainsi que la santé. En cas de grève, ce système offre des garanties suffisantes pour ne pas mettre en péril les prestations indispensables dans la santé.
L'interdiction générale de grève au personnel de soins n'est donc pas dans un rapport raisonnable avec l'objectif poursuivi. Les motifs évoqués pour justifier une telle mesure lors des débats au Parlement fribourgeois ne permettent pas d'aboutir à une autre conclusion, relève le TF.
Grande satisfaction du SSP
De son côté, le SSP rappelle qu'à ses yeux l'interdiction votée par le Grand Conseil avait pour 'objectif politique clair d'empêcher le personnel de l'HFR et du Réseau fribourgeois en santé mentale de se défendre face aux velléités de baisser leurs salaires et de supprimer l'application de la loi au personnel hospitalier'.
Le syndicat se réjouit dès lors de voir l'arrêt du TF ancrer le droit de grève pour le personnel du secteur dans la législation cantonale. De son point de vue, il s'agit d'un 'pas en avant gigantesque' pour ces employés et, par extension, pour toute la fonction publique fribourgeoise. (arrêt 8C_80/2018 du 9 octobre 2018)
/ATS