Moutier: vote annulé et réactions outrées

La justice bernoise a confirmé l'invalidation du vote de Moutier (BE) sur son rattachement ...
Moutier: vote annulé et réactions outrées

Les fronts se durcissent à Moutier après l'invalidation du vote

Photo: KEYSTONE/ANTHONY ANEX

La Question jurassienne s'enflamme à nouveau après l'annulation du vote de Moutier (BE) par le Tribunal administratif bernois. Les autonomistes appellent à la révolte, tandis que les antiséparatistes exigent la démission des autorités prévôtoises.

Dans un jugement très attendu, le Tribunal administratif bernois a confirmé jeudi l'invalidation du vote du 18 juin 2017 qui a vu une courte majorité de citoyens de Moutier choisir de rejoindre le canton du Jura. Les juges ont fait état 'de graves violations du droit' lors de ce scrutin qui s'était joué avec 137 voix d'écart.

Tout comme dans l'arrêt de la préfète du Jura bernois, qui avait annulé le vote en novembre 2018, les autorités autonomistes de Moutier sont stigmatisées. La commune, en tant qu'organisatrice du vote, 'ne pouvait prendre position dans le débat avec la même liberté que les autres intervenants', a souligné le Tribunal administratif.

Un éditorial du maire Marcel Winistoerfer et une lettre adressée à des parents d'élèves font partie des irrégularités mentionnées par la justice bernoise. Celle-ci a aussi blâmé la commune pour avoir refusé de fournir la liste électorale à la Chancellerie d'Etat du canton de Berne et à l'Office fédéral de la justice. Ces refus 'constituent de graves irrégularités qui jettent le trouble sur la crédibilité de la tenue dudit registre', peut-on lire dans le jugement de 102 pages.

Démocratie 'bafouée'

Le camp autonomiste, à l'origine des cinq recours déposés au Tribunal administratif contre l'annulation du vote en première instance, a vivement réagi suite à ce jugement. 'Le canton de Berne est prêt à tout pour conserver son territoire', a déclaré le secrétaire général du Mouvement autonomiste jurassien (MAJ) Pierre-André Comte. 'Le brigandage politique bernois ne passera pas', a-t-il lancé, appelant les militants à la 'révolte.'

Tout aussi remonté, le Conseil municipal prévôtois à majorité autonomiste a estimé que 'la démocratie, la seule, la vraie, celle qui tient compte de l'avis majoritaire du peuple, a été bafouée.' Le maire Marcel Winistoerfer a réfuté les accusations d'irrégularités dans l'organisation du vote du 18 juin, assurant n'avoir fait que corriger des 'allégations' du gouvernement bernois.

Dénonçant une décision politique, les autonomistes pourraient désormais se tourner vers le Tribunal fédéral (TF). Mais pour le moment aucune décision n'a encore été prise. Certains militants pensent en effet qu'il faudrait revoter le plus rapidement possible sachant que la procédure au TF peut se révéler longue.

Manifestations

'A titre personnel, je souhaite aller jusqu'au bout de la procédure. Mais la décision appartient aux militants', a précisé Marcel Winistoerfer. En attendant, les mouvements autonomistes jurassiens ont décidé d'organiser une manifestation vendredi soir dans les rues de Moutier, où les participants sont appelés à se rendre vêtus de noir.

Le camp adverse n'a pas attendu pour manifester sa victoire. Drapeaux bernois au vent, quelques dizaines d'antiséparatistes, selon des images du 19:30 de la RTS, se sont réunis jeudi soir déjà.

Appel à la démission

Dans le camp des antiséparatistes, les réactions ont été tout aussi virulentes. Moutier-Prévôté a exigé la démission des autorités de Moutier. 'Comment peut-on avoir confiance en ces personnes', a dit Morena Pozner, membre de mouvement. Marcel Winistoerfer, réélu en novembre à plus de 60%, a été accusé d'avoir 'trahi la confiance du peuple.'

Selon Moutier-Prévôté, il est 'exclu que les auteurs de ce fiasco assument une quelconque responsabilité dans l'avenir de la ville.' Le camp antiséparatiste espère que l'affaire soit portée auprès du TF qui, il en est persuadé, prononcera l'invalidation du vote. Il estime que si les autonomistes ne font pas recours, ils 'reconnaissent leur tricherie'.

Du côté des autorités cantonales bernoises, le Conseil-exécutif s'est dit 'consterné' par les dysfonctionnements relevés par le Tribunal administratif. Pour le conseiller d'Etat Pierre Alain Schnegg, 'ce scrutin fortement émotionnel aurait dû être exemplaire.'

Vers un nouveau vote

Interrogé sur la tenue d'un nouveau vote, M. Schnegg a reconnu qu'il était 'trop tôt pour spéculer'. Le président de la Délégation pour les affaires jurassiennes au Conseil-exécutif a néanmoins relevé que si le jugement devait être entériné, la population devrait avoir la possibilité de se prononcer une deuxième fois.

De l'autre côté de la frontière, le Gouvernement jurassien a aussi réaffirmé la nécessité d'organiser, le cas échéant, un nouveau vote. Les autorités jurassiennes ont dit 'regretter' le verdict du Tribunal administratif, ainsi que la période d'incertitude qui se prolonge pour les habitants de Moutier.

L'option d'un nouveau vote a aussi été soutenue par la Confédération. 'La position de la Conférence tripartite (ndlr: qui réunit la Confédération et les gouvernements jurassien et bernois) n'a pas changé. Si le vote devait finalement être annulé, un autre serait organisé', a commenté Jean-Christophe Geiser, responsable du dossier à l'Office fédéral de la justice.

/ATS
 

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