Le Parlement a bouclé la mise en oeuvre de l'initiative contre l'immigration de masse. Les Chambres ont confirmé vendredi leur soutien à un projet qui cible le marché du travail avec des contraintes limitées pour les employeurs.
Les votes ont été acquis facilement. Le Conseil des Etats a donné son feu vert par 24 voix contre 5 et 13 abstentions. Le National a suivi par 98 voix contre 67 et 33 abstentions, après un dernier baroud des mécontents et la réplique du camp des satisfaits.
Le chef du groupe UDC Adrian Amstutz a dénoncé un projet violant la Constitution et une capitulation devant l'UE. Ni pilotage autonome de l'immigration, ni contingents, la priorité à l'embauche de chômeurs bénéficiera même à tous les citoyens de l'UE.
Si le Conseil fédéral n'édicte pas d'ici au 9 février une ordonnance conforme au mandat populaire, l'UDC lancera une initiative pour résilier l'accord sur la libre circulation des personnes, a-t-il averti. L'Association pour une Suisse indépendante et neutre a annoncé juste après le débat qu'elle serait lancée 'dès que possible'.
Pour les chercheurs
Le président du PDC Gerhard Pfister n'était pas plus satisfait du non-respect de la volonté populaire. Le groupe s'est toutefois abstenu lors du vote afin que le Conseil fédéral puisse étendre la libre circulation à la Croatie et les chercheurs suisses revenir dans le programme de recherche européen Horizon 2020.
Le projet représente la meilleure solution possible dans les conditions actuelles, ont défendu les autres partis. Cela sauvegarde les relations bilatérales et ce n'est qu'un premier pas, ont-ils rappelé. Le peuple devra revoter sur la constitution en raison de l'initiative 'Sortons de l'impasse' (RASA) qui veut biffer purement et simplement l'article sur l'immigration.
La solution trouvée contribuera à résoudre les problèmes existants sur le marché du travail, se sont réjouis Balthasar Glättli (Verts/ZH) et Roger Nordmann (PS/VD). C'est la mise en oeuvre d'un article contradictoire avec un pragmatisme typiquement helvétique, a plaidé Ignazio Cassis (PLR/TI).
Priorité aux chômeurs
La majorité a tout fait pour ne pas mettre en danger les relations bilatérales avec l'UE en enfreignant l'accord sur la libre circulation des personnes. La réforme vise à limiter l'immigration européenne en incitant les employeurs à recruter des chômeurs plutôt que des personnes à l'étranger.
Dans le modèle par pallier retenu, le Conseil fédéral doit d'abord prendre des mesures pour épuiser le potentiel offert par la main-d'oeuvre en Suisse. Les patrons ne seront bridés que pour les groupes de profession, domaines d'activité ou régions économiques qui enregistrent un chômage supérieur à la moyenne.
Sous peine d'une amende pouvant aller jusqu'à 40'000 francs, les employeurs devront annoncer leurs postes vacants aux services publics de l'emploi et convoquer à un entretien ou un test d'aptitude les candidats sélectionnés par le service. Les patrons ne devront pas justifier leur éventuel refus. Les résultats de la procédure devront simplement être communiqués au service de l'emploi.
Solutions régionales
Les mesures concernant les embauches pourront être limitées à des régions économiques comme le Tessin et les cantons en proposer au Conseil fédéral, par exemple en cas de problèmes sérieux causés par des frontaliers. Le gouvernement pourra aussi arrêter des exceptions, notamment pour les entreprises familiales.
Si l'effet visé n'est pas atteint, il devra soumettre des mesures supplémentaires au Parlement. Pour l'immigration extra-européenne, l'actuel système de plafonds annuels sera poursuivi.
Le dossier pourrait rebondir très vite. Le Conseil fédéral a jusqu'au 9 février 2017 pour obtenir une réintégration rétroactive au 1er janvier de la Suisse à Horizon 2020 en ratifiant le protocole croate. Il veut également mettre en consultation bientôt un contre-projet direct à RASA.
/ATS