L'ex-greffier municipal de Frauenfeld écope d'un an de prison avec sursis pour avoir manipulé le dépouillement de l'élection au Grand Conseil thurgovien, l'an dernier. La justice de son canton le reconnaît coupable de fraude électorale par métier. Il va faire appel.
Dans son jugement rendu mercredi, le Tribunal de district de Frauenfeld a assorti la peine d'une amende de 3000 francs. Il suit ainsi largement le procureur général dans son réquisitoire. Celui-ci avait réclamé une peine de 15 mois avec sursis ainsi que l'amende finalement prononcée.
La défense avait plaidé l'acquittement par manque de preuves irréfutables. Elle a réclamé en vain des indemnités et une réparation pour tort moral. L'avocat du prévenu a annoncé que son client entendait faire appel du jugement devant la Cour suprême thurgovienne.
Erreur de dépouillement favorisant l'UDC
Pour le tribunal, la fraude électorale commise par Ralph Limoncelli 'ne fait aucun doute'. Suite à un recours contre le résultat peu plausible de l'élection par rapport aux calculs des scrutateurs, le greffier municipal a procédé, seul, à deux recomptages des listes, sur ordre de la Chancellerie d'Etat thurgovienne. Il n'en a tenu aucun procès-verbal.
Il a alors constaté que deux paquets de 100 listes valables des Vert'libéraux (PVL) avaient été attribués par erreur à l'UDC. Ces voix auraient dû apporter au PVL un siège supplémentaire au détriment de l'UDC et non pas le contraire.
Recomptages frauduleux du prévenu
Pour ne pas changer l'issue pourtant erronée du scrutin, l'accusé âgé de 50 ans a alors ajouté frauduleusement une centaine de listes de l'UDC, issues des réserves de matériel de vote. Ces listes ne comportaient aucun pli et très peu d'empreintes digitales, ce qui a attiré l'attention des enquêteurs. Dans le même temps, le prévenu a jeté l'un des deux paquets de 100 listes valables du PVL, estiment les juges, convaincus par les observations du procureur général.
Ralph Limoncelli n'a pas voulu pénaliser les Vert'libéraux par principe, estime le président du tribunal. Il a voulu éviter d'être cloué au pilori pour une lourde erreur de dépouillement, en tant que chef du bureau de vote de Frauenfeld. Le fait d'avoir procédé, seul, aux deux recomptages ne peut pas lui être imputé, selon la Cour. La Chancellerie d'Etat ne lui avait pas envoyé de renforts.
Le PVL a obtenu gain de cause
La manipulation a faussé les résultats électoraux à Frauenfeld et, par répercussion, dans le canton. Dans un premier temps, l'UDC s'était soudain vu attribuer un siège de plus que prévu au Grand Conseil et le PVL un mandat de moins qu'attendu. La répartition des sièges a été corrigée par la Chancellerie d'Etat quelques mois plus tard, une fois l'irrégularité découverte et avérée.
Cette dernière a alors porté plainte. L'accusé a tenté de l'en dissuader dans un courriel, ce qui l'a rendu encore plus suspect aux yeux du Ministère public. En automne dernier, le prévenu placé sous enquête pénale a tenté d'expliquer l'existence de ses empreintes sur une partie des bulletins incriminés en prétendant avoir procédé à un troisième recomptage, qui n'a toutefois jamais eu lieu.
Démission, mise à pied et dénégations
Le greffier municipal de Frauenfeld a démissionné en août dernier après que l'enquête pénale a été ouverte contre lui. Il a été libéré de ses fonctions peu après, bien avant l'échéance du délai de résiliation de son contrat de travail, sans que la ville n'en précise les raisons.
Face au Tribunal de district de Frauenfeld, le principal intéressé a rejeté les accusations dont il fait l'objet. Il a qualifié la version du Ministère public de 'théorie inventée de toutes pièces'.
En juillet dernier, le canton a annoncé son intention d'acquérir un nouveau système de dépouillement électronique. Ce dernier doit permettre d'empêcher toute fraude électorale à l'avenir.
/ATS