Les compagnies d'assurance maladie ont jusqu'à présent réalisé un bénéfice d'un demi-milliard de francs grâce aux assurances complémentaires. Mais, sans innovations, le marché des complémentaires risque de s'effondrer, prévient une étude publiée mardi à Berne.
Selon ce document mandaté par le portail de comparaison Comparis, les Suisses sont ceux qui mettent le plus au monde la main au porte-monnaie en matière de santé. Sur un total de 80 milliards de francs de dépenses de santé en 2016, les Suisses en ont déboursé un tiers de leurs propres poches, soit 24 milliards.
Et sur ce dernier montant, 5,4 milliards de francs (20%) étaient imputables à des prestations d'assurances complémentaires, très rentables pour les assureurs, relève l'étude.
Les compagnies d'assurances ont en effet davantage profité de ces montants que leurs clients. Entre 2008 et 2016, leur chiffre d'affaires (recettes des primes des assurés) a augmenté de 865 millions de francs pour atteindre 6,6 milliards de francs. En revanche, les remboursements de sinistres n'ont augmenté que de 353 millions de francs à 4,7 milliards, affirme l'étude. Le secteur empoche donc un bénéfice de 512 millions de francs.
Pour expliquer ces chiffes, l'expertise souligne que les assureurs affichent pour leurs complémentaires de faibles taux de sinistres et donc un rendement élevé. Sans oublier que les assurés de plus de 50 ans ne peuvent pratiquement plus changer de prestataire ou conclure de nouveau contrat. Dans le détail, ce sont les produits liés à l'hospitalisation stationnaire qui ont été particulièrement lucratifs pour les assureurs, précise encore l'enquête.
Bientôt la fin d'une époque?
Selon l'auteur de l'étude, l'économiste Pius Gyger, les besoins de la population vont bien au-delà des prestations couvertes par l'assurance maladie de base. De plus, la disposition des Suisses à payer pour des services de santé au-delà de cette offre est élevée.
Mais selon Felix Schneuwly, expert en assurance maladie chez Comparis, il est urgent que les assureurs fassent preuve d'innovation, faute de quoi cette belle période pour eux pourrait rapidement être révolue.
'Les recettes des primes de l'assurance complémentaire pour les malades hospitalisés sont désormais largement utilisées pour le financement des prestations obligatoires de l'assurance de base et pour des tâches nécessitant un financement public, comme l'enseignement et la recherche', explique le spécialiste. L'Autorité des marchés financiers veut d'ailleurs désormais empêcher ce principe de vases communicants.
Dynamisme et innovation
Selon lui, la prise en charge ambulatoire de la médecine dite aiguë a aussi passablement mis la pression sur les assurances complémentaires d'hospitalisation stationnaire. Avec leur modèle de division d'hospitalisation flexible (Flex), moins cher, les assurés peuvent en effet décider au cas par cas de passer en division semi-privée ou privée, économisant ainsi des dizaines de milliers de francs au fil des années.
M. Schneuwly appelle donc la branche des assurances à être plus dynamique et à travailler avec des fournisseurs de prestations médicales innovants afin de pouvoir proposer des produits complémentaires attractifs et réagir encore à temps à ce glissement.
Il voit également un potentiel supplémentaire dans le domaine des produits d'assurance pour soins de longue durée, qui reste à ce jour une niche absolue en Suisse. Ces produits sont chers et ne sont pas adaptés aux besoins de l'assuré, constate-t-il. Il faut donc innover aussi dans ce secteur.
/ATS