Des Soudanais décrivent un climat de « peur »

Des Soudanais ont raconté jeudi le climat de 'peur' des derniers jours à Khartoum face à la ...
Des Soudanais décrivent un climat de « peur »

Des Soudanais décrivent un climat de

Photo: KEYSTONE/EPA/MARWAN ALI

Des Soudanais ont raconté jeudi le climat de 'peur' des derniers jours à Khartoum face à la répression sanglante contre le mouvement de contestation. Le gouvernement a lui tenté d'en minimiser l'ampleur jeudi.

Dans un bilan officiel, le ministère de la Santé a affirmé à l'AFP que le 'nombre de morts' depuis lundi s'élevait 'à 61'. Il avait assuré plus tôt, via l'agence officielle Suna, que ce nombre n'avait 'pas dépassé 46', en démentant catégoriquement le bilan du comité de médecins proche de la contestation.

Selon ce comité, au moins 108 personnes ont été tuées et plus de 500 blessées en trois jours, pour la plupart dans la dispersion brutale d'un sit-in devant le siège de l'armée lundi à Khartoum.

Cette opération, qualifiée de 'massacre' par la contestation et attribuée à des 'milices' du Conseil militaire de transition, a été condamnée par le secrétaire général de l'ONU et plusieurs chancelleries occidentales.

Jeudi, l'Union africaine (UA) a à son tour réagi en annonçant la suspension avec effet immédiat du Soudan, 'jusqu'à l'établissement effectif d'une autorité civile de transition'.

Routes rouvertes

Pendant ce temps, les principales artères de la capitale ont rouvert à la circulation, en présence d'un nombre important de paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF), rattachés aux services de sécurité.

'Nous vivons dans un état de terreur à cause des coups de feu qui se produisent de temps à autre', même si la situation 'est meilleure' aujourd'hui, a raconté à l'AFP un habitant du sud de Khartoum. Malgré cette apparente accalmie, il a confié avoir 'peur pour (ses) enfants en sortant dans la rue'.

A Oumdourman, la ville voisine de la capitale, un résident a également évoqué un 'sentiment de terreur' face à 'la prolifération de véhicules militaires avec cette quantité d'armes'.

La circulation dans les rues de Khartoum apparaît plus significative que ces derniers jours, avec quelques voitures, bus et minibus. Davantage de magasins sont ouverts en ce deuxième jour de la fête marquant la fin du jeûne du ramadan (Aïd el-Fitr).

Comme les deux jours précédents, de nombreux vols à destination de Khartoum avaient toutefois été annulés mercredi soir.

Long soulèvement

Le Soudan est secoué depuis décembre par un soulèvement populaire inédit déclenché par le triplement du prix du pain et qui a conduit au renversement par l'armée de l'ex-président Omar el-Béchir le 11 avril.

La mobilisation s'est poursuivie, les manifestants campant devant le QG de l'armée pour réclamer le transfert du pouvoir aux civils. Lundi, la dispersion brutale de ce rassemblement devenu emblématique a provoqué une onde de choc parmi les protestataires.

Donnant quelques précisions sur le premier bilan des autorités, Souleiman Abdul Jabbar, sous-secrétaire au ministère de la Santé, a déclaré que 52 personnes étaient mortes 'à Khartoum, dont 49 civils tués par balles'. Trois personnes portant l'uniforme des Forces de soutien rapide (RSF) ont été poignardées', a-t-il ajouté.

Présentées par leurs détracteurs comme un avatar des redoutables milices Janjawid ayant sévi au Darfour (ouest), les RSF sont accusées d'être les principaux auteurs de la répression depuis lundi.

M. Abdul Jabbar a encore affirmé que deux corps avaient été retrouvés dans le Nil et que quatre personnes étaient mortes à Al-Obeid (centre), quatre au Darfour-Occidental et un à Gadaref (est).

Selon le comité de médecins, 40 personnes ont été retrouvées dans les eaux du fleuve, s'appuyant sur des témoignages de médecins sur place. Il n'a toutefois pas donné d'autres détails.

Détermination intacte

Mais, en dépit de la répression et de la peur, les chefs du mouvement continuent d'afficher leur détermination. 'La révolution continue et notre peuple est victorieux malgré le terrorisme et la violence des milices', a lancé l'Association des professionnels soudanais (SPA), un acteur majeur du mouvement.

Elle a appelé à 'la grève indéfinie et à la désobéissance civile', tout en mettant en garde contre les appels à la violence. L'arme 'pacifique' privilégiée est le blocage des routes: les manifestants ont érigé des barricades de fortune faites de briques, de pierres, de pneus en flammes.

Pour les manifestants, l'identité des auteurs de la répression ne fait pas de doute: les 'milices' du Conseil militaire, en particulier les RSF.

Issues des anciennes milices arabes Janjawid du Darfour, théâtre d'une longue guerre civile, les RSF ont été déployées en masse dans le pays, en particulier à Khartoum.

Le chef des RSF, vice-président du Conseil militaire et ancien responsable des Janjawid, le redouté Mohamad Hamdan Daglo, surnommé 'Hemeidti', a assuré qu'il se tenait aux côtés des 'révolutionnaires'. Mais il a aussi juré de ne pas 'permettre le chaos', en référence notamment aux barricades.

/ATS
 

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