La Commission européenne a annoncé mercredi lancer contre la Pologne une procédure d'infraction. Bruxelles conteste la mise en place d'une commission d'enquête controversée sur 'l'influence russe', soupçonnée de viser l'opposition.
'Le collège (des commissaires) a décidé de lancer une procédure d'infraction en envoyant une lettre de mise en demeure' aux autorités polonaises, a déclaré le commissaire européen au Commerce, Valdis Dombrovskis, lors d'un point de presse. Cette action pourrait conduire à une saisine de la justice européenne.
Une porte-parole de la Commission européenne a précisé que la lettre de mise en demeure serait envoyée jeudi aux autorités polonaises. Bruxelles a décidé de sévir malgré l'annonce vendredi par le président polonais Andrzej Duda d'un amendement modifiant partiellement la loi instaurant cette commission spéciale, à l'approche des élections législatives de l'automne.
Cette instance est accusée de cibler le chef de la principale formation de l'opposition, Plateforme civique (PO), Donald Tusk, ancien Premier ministre polonais et ex-président du Conseil européen. Ce dernier est la bête noire du parti populiste conservateur Droit et Justice (PiS) au pouvoir.
La Commission européenne et les Etats-Unis avaient exprimé leur 'préoccupation' la semaine dernière à propos de la création de cette instance. Le département d'Etat a estimé qu'elle 'pourrait être utilisée de manière abusive pour interférer avec des élections libres et équitables en Pologne'.
Attaque 'sans fondements'
Le commissaire européen à la Justice Didier Reynders avait adressé une lettre au gouvernement polonais pour lui faire part de ses inquiétudes de voir un 'organe administratif capable d'empêcher des individus d'accéder à des fonctions officielles'.
Dans un tweet publié après l'annonce de la commission européenne, le vice-ministre des Affaires étrangères Szymon Szynkowski vel Sek a indiqué qu'après avoir examiné les préoccupations de la Commission européenne, 'nous transmettrons calmement les arguments juridiques et factuels dans cette affaire'.
'Notre objectif est clair: examiner et limiter les influences russes en Pologne et en Europe. Nous sommes convaincus que cela devrait unir tous les Etats et institutions démocratiques', a-t-il ajouté. Le vice-ministre de la Justice Sebastain Kaleta a quant à lui déclaré que la Commission européenne 'attaquait à nouveau la Pologne sans fondements juridiques'.
Commission 'stalinienne'
En Pologne, cette commission a été qualifiée d''anticonstitutionnelle' et 'stalinienne' par l'opposition et nombre de juristes. Son amendement par le président Duda a été accueilli avec réserve et sarcasme.
Varsovie est en conflit ouvert avec l'UE à propos des questions d'Etat de droit. La Commission a déjà lancé plusieurs procédures d'infraction contre la Pologne à propos de réformes du système judiciaire accusées de saper l'indépendance des juges. Elles ont valu à Varsovie des condamnations par la justice européenne, la dernière datant de lundi. Les autorités polonaises ont été condamnées à quelque 556 millions d'euros de pénalités pour ne pas avoir respecté une décision de la CJUE à ce sujet.
/ATS