Lors de la dernière étape de son voyage mardi à Washington, Johann Schneider-Ammann a rencontré des ministres du gouvernement Trump et la fille et conseillère du président américain, Ivanka. Dans une interview à l'ats, le conseiller fédéral revient sur son périple.
ATS: Qu'est-ce qui a motivé votre voyage-marathon en Russie, en Indonésie, en Arabie saoudite et aux Etats-Unis?
Un voyage-marathon n'était pas prévu mais il y avait des discussions spécifiques avec chacun de ces quatre pays que je voulais mener. Et ces visites avaient toutes un fil rouge: la situation économique et le système de formation professionnelle. Nous avons évoqué ces deux thèmes partout où nous étions, y compris à Washington. L'importance sociale majeure de la formation professionnelle m'a été confirmée partout.
Avec le secrétaire américain au Commerce, vous avez également parlé des pays qui ont un excédent commercial avec les Etats-Unis, y compris la Suisse. Peut-on craindre de nouvelles mesures de la part de Washington?
Nous avons évoqué ce sujet et constaté que la Suisse a un avantage réel sur les Etats-Unis. Mais ce pays la devance dans le domaine des services, de sorte que la balance commerciale est à peu près équilibrée. J'ai le sentiment que Wilbur Ross a donné des signes d'apaisement même si ce dossier n'est pas encore clos.
Vous êtes allé aux Etats-Unis durant la semaine 'Made in USA' ('Fabriqué aux Etats-Unis'), qui célèbre la production de biens américains. L'idée selon laquelle ce qui est vendu dans un pays doit aussi l'être produit était-elle un thème de discussion dans les autres pays dans lesquels vous vous êtes rendu?
La tendance à la production locale et au protectionnisme est connue. On se préoccupe d'abord de ses propres emplois. Cela ne doit toutefois pas se traduire par le verrouillage et la fermeture, mais par l'innovation et la compétitivité. Les Etats-Unis peuvent se permettre le 'Made in USA' dans une certaine mesure du fait de leur immense marché intérieur. Mais un petit marché comme la Suisse ne peut même pas envisager cette idée. Les marchés ouverts augmentent les flux commerciaux, ce qui est synonyme de création de valeur ajoutée et d'emplois.
Vous avez rencontré quatre acteurs mondiaux lors de votre voyage. La Suisse veut-elle aussi faire la course dans le peloton de tête?
Ce n'était pas l'idée de base. Nous ne parcourons pas le monde pour évangéliser les autres pays. Mais la Suisse doit nouer des contacts et conserver son réseau. C'est ce que j'ai fait aux Etats-Unis. J'y ai rencontré Wilbur Ross pour la deuxième fois. Et plus on se connaît, mieux on peut dialoguer. J'ai voyagé toute ma vie dans le cadre de mon travail pour voir des clients, y compris lorsque ces derniers ne voulaient rien savoir de moi. Mais plus tard alors qu'ils avaient des projets d'investissement, ils se sont rappelés de moi et sont revenus vers nous. Ce principe s'applique aussi à la politique: vous devez vous connaître et avoir une relation basée sur la confiance qui se gagne au fil du temps pour négocier dans de bonnes conditions.
Comment présentez-vous l'économie helvétique à vos partenaires?
Nous nous présentons au monde comme un partenaire d'affaires solide et équitable à la recherche de relations commerciales et de parts de marché plus importantes. Meilleur est l'accès au marché, comme c'est le cas pour les quatre pays que j'ai visités, plus la situation sur le marché de l'emploi est sûre en Suisse. Ma politique poursuit le but d'assurer des perspectives à tous en Suisse: soit un emploi, une certaine indépendance et une existence autonome. Nos visites visent aussi à démontrer que nous sommes innovants et compétitifs.
Qu'apporte l'accord de double imposition entre la Suisse et l'Arabie saoudite?
Comme tout accord de double imposition, il est censé soutenir, ici et là, l'investissement. Pour investir dans un autre pays, un investisseur helvétique a besoin d'une convention fiscale, d'une protection de ses investissements et d'un accord de libre-échange. En principe, ces trois conditions sont désormais remplies pour les investisseurs privés en Arabie saoudite.
Au cours de votre voyage de 10 jours, vous avez eu des discussions sur de nombreux thèmes en lien avec la politique étrangère. Avec l'annonce du départ de Didier Burkhalter du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), un changement de Département, est-il à l'ordre du jour pour vous?
Non il n'est pas question d'un changement vers le ministère des affaires étrangères. Mais la politique étrangère est aussi toujours de la politique économique extérieure. Nous avons rempli notre mission économique et la manière dont cela est perçu par la communauté internationale n'est pas sans composante politique. Didier Burkhalter a été informé de ce voyage et a salué notre démarche. En tant que pays neutre et sans agenda caché, la Suisse bénéficie d'un énorme crédit sur la scène internationale. Nous avons, par exemple, offert d'agir comme médiateur entre l'Iran et l'Arabie saoudite. Dans les deux pays, des discussions se tiennent pour circonscrire ce mandat, ce qui prend du temps.
/ATS