L'initiative de la Jeunesse socialiste 'Pas de spéculation sur les denrées alimentaires' ne permettra pas de lutter contre la pauvreté et la faim dans le monde. Le Conseil des Etats l'a rejetée mercredi par 32 voix contre 10 et 1 abstention.
Le texte vise à interdire tout investissement, direct ou indirect, dans des instruments financiers liés aux matières premières agricoles et aux denrées alimentaires. L'interdiction, qui frapperait les sociétés ayant leur siège ou une succursale en Suisse, vaudrait aussi pour la vente de produits structurés.
Seuls des contrats avec des producteurs et des commerçants et portant sur la garantie des délais ou des prix fixés seraient autorisés. Il faut lutter contre la pauvreté et de la faim dans le monde, a reconnu la majorité. mais les recettes proposées sont inadéquates.
'Ces dernières années, ce n’est pas la spéculation qui a fait flamber ou fluctuer exagérément les prix des matières premières, elle a même plutôt lissé les variations', a défendu Pirmin Bischof (PDC/SO). Un article constitutionnel en Suisse n'aurait en outre qu'un effet limité car les prix sont négociés sur des bourses à l'étranger.
Mauvais signal
Un oui à l'initiative donnerait un mauvais signal pour la place économique car aucun autre Etat n'a de réglementation si contraignante. Le secteur des matières premières représente près de 4% du produit intérieur brut et emploie plus de 10'000 personnes en Suisse, a rappelé Martin Schmid (PLR/GR). L'initiative aiderait Singapour à récupérer une partie des transactions.
La Suisse ne peut pas résoudre seule la faim dans le monde, l'initiative n'aurait aucun impact sur ce problème, mais elle réduirait massivement notre liberté économique, a renchéri Peter Föhn (UDC/SZ). L'approvisionnement alimentaire en Suisse pourrait être touché et le texte générera une bureaucratie énorme à éviter.
Tout à fait supportable
'Qui veut tuer son chien l'accuse d'avoir la rage', a objecté Luc Recordon (Verts/VD). L'initiative interdit uniquement les contrats purement spéculatifs, elle ne portera pas atteinte à l'ensemble du secteur des matières premières et doit donc être soutenue.
L'activité des banques ou caisses de pension ne sera pas remise en cause, les conséquences du texte sont absolument supportables, a aussi estimé Christian Levrat (PS/FR). Selon lui, il faut tout faire pour réduire la faim dans le monde. La spéculation n’est pas la seule responsable des difficultés de répartition des ressources alimentaires, mais elle joue un rôle dans la formation de bulles spéculatives comme en 2007-2008 et doit être combattue.
Aide au développement
Le Conseil fédéral veut réduire la faim et la pauvreté, a relevé le ministre de l'économie Johann Schneider-Ammann. La Suisse a consacré l'an dernier 3,2 milliards de francs à l'aide au développement en 2014 dont un quart à des programmes d'aide agricole. Il vaut mieux miser sur cette voie et sur les organisations internationales que sur une interdiction impraticable et dommageable pour l'économie suisse.
Le National doit encore se prononcer.
/ATS